Quick Change
Quick Change raconte l'histoire de Dorina, transsexuelle entre deux âges qui tente de trouver sa place dans le monde.
LE CHANGEMENT, C'EST MAINTENANT
Il n’y a (évidemment) pas que Brillante Mendoza aux Philippines. Parmi les jeunes cinéastes les plus prometteurs figure Eduardo Roy Jr qui s’était déjà distingué il y a deux ans avec le très bon Baby Factory (racontant l’histoire, en période de Noël, d’une infirmière travaillant dans une maternité). Avec son nouveau film, Quick Change, Eduardo Roy Jr confirme tous les espoirs placés en lui. Le long métrage poursuit le geste entamé par Baby Factory qui se caractérisait déjà par un mélange subtil de tendresse et de dureté. Quick Change, qui marie la comédie queer au thriller social, va encore plus loin dans le grand écart et prend davantage de risques. Ce qui le rend d’autant plus stimulant.
On a déjà parlé à plusieurs reprises du « new » new queer cinema sur FilmDeCulte, avec des films tels que les Français La Vie d’Adèle, L’Inconnu du lac ou encore l’Américain Breathe. A l’autre bout de la planète, le « new » new queer cinema est aussi d’actualité. L’identité transgenre n’est pas le premier sujet de Quick Change. Ses enjeux proches du thriller en parlent en creux, avec ses opérations chirurgicales réalisées dans l’illégalité ; des injections faites dans des visages parfois tellement déformés qu’on a l’impression que les personnages se préparent à participer à la partouze difforme de Society. Mais Quick Change n’est pas un « film sur la transsexualité » comme on avait des films « sur l’homosexualité ». Le film parle au moins autant du culte de la beauté et de la performance, avec ses concours de miss… ou ses concours de bites. Dorina, l’héroïne du long métrage est ambiguë : sympathique tatie pleine de bonnes intentions et ange noir la seringue à la main. Son parcours est complexe, pas lénifiant, pas dans la séduction, à l’image d’un dénouement aussi elliptique que puissant.
Avant cela, Quick Change fait preuve d’une liberté de ton à des années lumières des consternants discours médiévaux que l’on subit actuellement en France. Il faut voir pour le croire ce portrait familial décomplexé où un gamin est témoin des opérations faites sur des transsexuels, le tout avec ce style extrêmement vivant propre au cinéma philippin contemporain. A l’heure où certains voudraient brûler Tomboy, entendre le jeune garçon s’exclamer « Tata, ta bite est plus grosse que celle de tonton ! » est aussi drôle que salutaire.