Présidents
France, 2021
De Anne Fontaine
Scénario : Anne Fontaine
Avec : Pascale Arbillot, Jean Dujardin, Grégory Gadebois, Doria Tillier
Photo : Yves Angelo
Durée : 1h40
Sortie : 30/06/2021
Nicolas, un ancien Président de la République, supporte mal l’arrêt de sa vie politique. Les circonstances lui permettent d’espérer un retour sur le devant de la scène. Mais il lui faut un allié. Nicolas va donc partir en Corrèze, pour convaincre François, un autre ancien Président de faire équipe avec lui...
PROMENONS-NOUS DANS LES BOIS
Le point positif du film, c’est Jean Dujardin en Nicolas Sarkozy. Par son sens de l'imitation, son timing comique et son charisme, il fournit les meilleurs moments de cette comédie politique surprenante. On ne peut pas en dire autant de Grégory Gadebois, qui ne retrouve presque rien du charme caché d’Hollande, mal servi par une écriture sans finesse. Le pitch était pourtant excitant sur le papier. On aurait pu s'attendre à un regard vif et satirique qui exploiterait pleinement le potentiel de ce "What if… ?" improbable. Au lieu de ça, le scénario opte pour un récit villageois pépère et intimiste, presque entièrement sis à Saint-Bonnet en Corrèze, entre la maison de François, la mairie et l’auberge. On nous parle de campagne présidentielle, de sondages, de financements, mais tout se passe dans trois décors.
Plus encore que l’absence d’ampleur visuelle du film (assumée car voulue), c’est son absence de vision d’ensemble qui fait mal. Les questions politiques sont survolées et on préfère rester sur l’intimité (fictive et caricaturale) des deux ex-présidents. C’est dommage car la question centrale est forte : en alliant Sarkozy à Hollande, peut-on faire mieux que le "en même temps" macronien ? Idem avec la question de l’union nationale, le "front républicain" ultime, qui est centrale au projet mais n’est pas vraiment traitée. Tout est au contraire joué en mode mineur. Il y a clairement un parti-pris de montrer les petites vies de ces gens somme toute normaux, mais c’est trop voir les choses par le petit bout de la lorgnette, et c’est frustrant au vu des possibilités politiques et humaines du syno.
De plus, le film est dénué du moindre drive narratif. Il y a pourtant un objectif: monter en un temps record une campagne présidentielle d’un genre nouveau. Mais là encore le film choisit de temporiser. Nicolas va gentiment à Saint-Bonnet, il prend son temps, fait du tennis, du vélo, on boit un verre, on discute… Il y a tout un segment où, si les personnages n’étaient pas des ex-présidents, le récit n’aurait presque aucun intérêt. C’est terrible. Une fois arrivé au mitan du film, lorsque Hollande accepte la proposition de Sarkozy, on pense alors que le film va décoller, qu’on va quitter la Corrèze et rentrer dans un vrai récit électoral palpitant. Que nenni ! On reste à Saint-Bonnet, et on continue à manger, boire, et discuter.
La faiblesse de la satire (Sarkozy ramasse les crottes de son chien et Hollande s’éclate au saxo…) finissent d’achever ce film si frustrant. Creux sur le plan politique, trop faible dans l’humour, et ne fouillant même pas l'intimité de ses personnages tant ils sont caricaturés voir même déformés pour Hollande, le projet s’avère un ratage presque complet.