Pinocchio
Italie, 2002
De Roberto Benigni
Scénario : Roberto Benigni, Vincenzo Cerami
Avec : Roberto Benigni, Nicoletta Braschi, Carlo Giuffrè, Kim Rossi Stuart
Durée : 1h48
Sortie : 26/03/2003
Un pantin de bois, créé à partir d'un bois magique par Gepetto, fait l'apprentissage de la vie sous le regard de sa marraine, la Fée Bleue.
ALLUMEZ LE FEU
On avait laissé Roberto Benigni à genoux devant Martin Scorsese à Cannes puis à cheval sur deux fauteuil aux Oscars, tout heureux qu'il était de voir sa Vie est belle multirécompensée. Du nectar au purin, il n'y a qu'un pas (ou qu'un film): les lendemains sont difficiles avec Pinocchio, adaptation de pacotille du conte de Collodi. Certes, on ne doute pas de la bonne volonté mise dans ce projet par l'artiste italien (qui y a d'ailleurs mis tous ses deniers), mais plutôt de ses capacités à le réaliser avec succès. Pathétique naufrage faisant rimer plus que jamais bouffon avec couillon, Pinocchio est l'oeuvre du doux euphémisme. Sous couvert de magie, on présentera des décors factices donnant l'impression d'une balade dans un Nigloland de luxe où l'estomac d'une baleine sent bon le polystyrène (malgré la contribution de Danilo Donati). Derrière l'innocence des personnages, il faut surtout voir un amoncellement de protagonistes tous plus abrutis les uns que les autres, des camarades de Pinocchio à Gepetto en passant par l'inénarrable Fée Bleue dont chacune des apparitions devient un quasi running gag, avec une Nicoletta Braschi maquillée au pochoir, le rictus éternellement niais et le balais à la place de la colonne vertébrale. Palme du grotesque pour Benigni en pantin vieilli et spasmophile: sa performance est proprement insupportable.
Ni la mise en scène, ni l'écriture ne rattrapent le ratage: l'ellipse grossière, la platitude visuelle de l'ensemble, l'enchaînement des péripéties comme autant de formalités ronflantes alors qu'elles sont sensées jalonner l'apprentissage de la vie par Pinocchio (il n'y a guère que le pantin pour ponctuer le film de son émerveillement face à "tant d'aventures"), tout pousse au détachement certain et à l'ennui gras. Il y avait pourtant de quoi faire: le passage au Pays des joujoux, traversée délirante et animale propice à l'explosion visuelle, vire au simple tour de manège propret et criard - un peu à l'image du film. Ratage sincère mais malgré tout abyssal, Pinocchio, c'est un peu le conte de fée enchanteur et plutôt moraliste qui se transforme en pure ôde à la pyromanie.