Pai
Whale Rider
Nouvelle-Zélande, 2003
De Niki Caro
Avec : Keisha Castle-Hughes, Cliff Curtis, Vicky Haughton
Durée : 1h41
Sortie : 17/09/2003
Après avoir survécu à son frère jumeau et à sa mère, morts lors de l'accouchement, la jeune Paï supporte seule le poids de la culpabilité. Elle se doit de rompre la tradition ancestrale, où seul le premier mâle d’une famille noble peut prétendre devenir chef et perpétrer le culte de Paikea.
L’AME DES FEMMES ET DES BALEINES
Précédé par une réputation flatteuse et couvert de prix divers, Paï est une œuvre aux riches vibrations. L’histoire parvient à entremêler subtilement des thèmes aussi variés que la condition de la femme, ou les mythes et coutumes du peuple Maori. A l’instar de L’Ame des guerriers de Lee Tamahori, Paï avance un dur constat sur la situation ethnique néo-zélandaise. Niki Caro choisit pourtant de ne pas s'attarder sur l'aspect social pour se focaliser sur la fable formant la fibre de son récit. Sa limpidité apparaît au gré d'images magnifiques des côtes néo-zélandaises en apportant une certaine poésie visuelle basée sur le bleu et le vert; la rencontre de l'océan et de la terre. L’essentiel de l’histoire est contenu dans l’espace qui sépare, et rapproche, les deux personnages principaux (Paï et son grand-père). Le vieil homme, déchiré entre le respect de la tradition et l’amour filial qu’il éprouve pour sa petite-fille, porte la lourde responsabilité de transmettre l’héritage spirituel et historique d’un peuple. Alors que la jeune fille ne cherche rien d’autre que l’amour inconditionnel de son grand-père, pour qui elle voue une admiration sans borne. Toute la subtilité de Paï est contenue dans cette relation ambivalente.
TIME AND TIDE WAIT FOR NO WOMAN
Comment traiter le sujet, usé jusqu’à la corde, de la jeune fille qui cherche à assumer un rôle d’homme dans une société patriarcale? Niki Caro parvient à lui apporter un regard neuf et rempli de poésie, parfois jusqu’à l’abstraction. La novice Keisha Castle-Hughes donne en grande partie la force nécessaire à son rôle-titre. Si jeune et déjà charismatique, son minois rêveur, sa gestuelle aux attributs masculins l’emmènent là où Niki Caro veut guider son film; vers les contrées où la spiritualité et le sacré prennent corps: la mer. Elément symbolique, personnage principal du film, l’océan est là où le film commence et se termine, comme une matrice primordiale, une substance mère, implacable et puissante, lieu où naissent et se délitent les légendes. Le film tout entier semble y faire face, tournant ainsi le dos à la terre, pour mieux contempler ses origines, et celles des Maoris. Dans ce milieu liquide, un bout de femme va pouvoir se lever contre l'opiniâtreté de son grand-père et la rigidité des principes qu’il incarne. Cachée, elle suivra les cours de son grand-père où l'on retiendra une scène où il apprend aux jeunes garçons l'art de se battre selon la pratique Maori. Il apparaîtra alors grimaçant tel un samouraï masqué du théâtre nô. Alors, on pourra regretter une fin légèrement convenue, quand l’ensemble de l’œuvre est parvenue à éviter les nombreux écueils dressés par ses prédécesseurs thématiques. Heureusement, Paï demeure un film sensible, doux, passionnant, illuminé par la musique de Lisa Gerrard, et ébloui par les qualités du jeu de son interprète principal.
En savoir plus
La légende Maori du Whale Rider raconte l’histoire de l’esprit gardien qui veille depuis la mer sur son peuple. Il est dit qu’il arriva sur leur île (Aotearoa dans la langue indigène) en premier sur le dos d’une baleine depuis la terre mythique du Hawaïki. Depuis, tous les chefs sont ses descendants, de sexe mâle, et premiers de chaque lignée.