Northfork
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États-Unis, 2003
De Michael Polish
Scénario : Michael Polish, Mark Romanek
Avec : Peter Coyote, Claire Forlani, Darryl Hannah, Nick Nolte, Mark Polish, James Woods
Sortie : 19/11/2003
1955. Les habitants d’une petite bourgade américaine doivent être évacués après la construction d’un barrage. Des hommes habillés en noir sillonnent la campagne environnante pour convaincre les derniers forcenés de quitter les lieux. Un pasteur recueille un orphelin atteint d’une maladie incurable.
LES HOMMES EN NOIR
Un film suffit parfois à asseoir une réputation. Récit d’un amour impossible entre une jeune femme mannequin et deux frères siamois cramponnés l'un à l'autre, Les Frères Falls avait séduit la critique par son originalité et la pudeur de sa mise en scène. Leur deuxième film, Jackpot, n’ayant pas eu les honneurs d’une distribution en France, Northfork a valeur de test pour les cinéphiles. Quatre longues années d’attente pour avoir la confirmation (ou non) de la présence d’une nouvelle fratrie de surdoués. Dès les premières minutes, Northfork impose le style des jumeaux californiens. Les dialogues sont rares, presque chuchotés, l’image demeure magnifiquement composée et le ton à la fois mélancolique et distant crée instantanément une atmosphère onirique. Mais si Les Frères Falls se concentrait sur son intrigant trio observé en huis clos, Northfork a la folie des grands espaces. Les frères Polish transportent leur univers si particulier dans une communauté humaine qui doit accepter la fin d’un cycle et le début d’un autre. Le thème de la séparation, déjà exploré dans leur précédent opus, trouve ici un prolongement immédiat: perte de sa maison, de son innocence, de sa foi ou de son passé, disparition plus dramatique de la vie d’un enfant abandonné par ses parents de substitution.
LE TEMPS DETRUIT TOUT
Plusieurs micro-événements se succèdent, au gré du vent qui s’engouffre dans la lande désolée et bientôt envahie par les eaux du barrage. Personnages centraux de Northfork, l’employé du gouvernement et le pasteur sont tous les deux confrontés à des événements irrationnels et inexplicables. Le passage de vie à trépas d’un garçon provoque de curieuses réactions en chaîne. De même que l’apparition saugrenue d’une famille d’anges gardiens déchus, résignée à faire le deuil de ses routines, pour amorcer une nouvelle aventure. Les rêves d’Irwin imprègnent peu à peu la réalité, transcendent les émotions et suscitent l’émerveillement de Willis O’Brien, sourire en coin et regard blasé au début du film, puis air hébété et sentiment confus après une première expérience paranormale. Les frères Polish ne donnent aucune réponse, laissent volontairement des espaces de réflexion. Leur cinéma est essentiellement sensitif, Northfork presque évanescent: un songe brumeux né d’une collusion hypothétique entre les romans de Theodore Sturgeon et l’univers de Joel et Ethan Coen (Barton Fink). Serti par un casting flamboyant sur lequel trône Daryl Hannah, troublante en Flower Hercules, Northfork établit définitivement les Frères Polish comme des auteurs à suivre.
