Night and Day

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Night and Day
Bam gua Nat
Corée du Sud, 2008
Durée : 2h25
Sortie : 23/07/2008
Note FilmDeCulte : *****-
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Sung-nam, un jeune peintre coréen, doit, pour échapper à une arrestation fuir son pays. Il s'envole pour Paris et trouve refuge dans une pension du 14e arrondissement appartenant à un coréen. D'abord un peu perdu dans ce pays qui lui est inconnu, et souffrant de l'absence de sa femme, il traine dans les rues de Paris. Mais, il s'acclimate progressivement à la vie occidentale et fait la connaissance de deux jeunes Coréennes : Hyun-ju et sa colocataire Yu-jeong, une étudiante aux Beaux-arts. Au fil de l'été, il tombe de plus en plus amoureux de Yu-jeong et de Paris.

PARIS TOUT CE QUE TU VEUX

Cinéaste de l'indécision sentimentale, Hong Sang-Soo se devait de réaliser un film à Paris, la ville romantique par excellence, et a franchi le pas à la demande du Musée d'Orsay. Le réalisateur coréen s'invente un nouveau double de fiction en la personne d'un peintre contraint à l'exil pour une fumeuse histoire de joint, le temps d'explorer ses propres souvenirs autobiographiques et de questionner le couple et ses petits tracas adultérins. Soumis à une décote brutale depuis l’échec de son passage à Cannes avec l’aride Conte de cinéma, l’auteur de Turning Gate excelle toujours dans l’art du portrait. Si la structure narrative de Night and Day pèche parfois, avec des idées plus ou moins exploitées au fil de l’intrigue comme l’écriture d’un journal intime ou l’utilisation d’une voix-off redondante, les personnages existent au-delà de l’écran, par enchantement, si bien que leurs vies vacillantes restent longtemps à l’esprit, comme celles de lointains amis oubliés.

L'HOMME QUI AIMAIT LES FEMMES

Hong Sang-Soo évite deux écueils : la carte postale cinématographique et l’hommage facile à la Nouvelle Vague. Bien sûr, son cinéma s’inscrit dans une certaine tradition minimaliste chère au cinéma français, d’Eric Rohmer à Jean Eustache, mais il ne convoque aucun fantôme du passé et reste centré sur ce qu’il connaît le mieux : la communauté coréenne. Long (2h25) et exigeant, surtout dans sa première partie, quand notre héros semble aussi perdu que nous au sein du récit, Night and Day se déploie progressivement dans toute son ampleur dramatique et morale. Le peintre hésite entre deux femmes et deux vies, pleure de rage et de lâcheté (déchirante scène sur le palier de la pension), fait l’inverse de ce qu’il veut et désire profondément, s’illusionne d’une liberté nouvelle mais provisoire. Chacun essaie de porter son plus beau masque social. La jeune fille qui aide les SDF dans la rue est perçue comme une égoïste et une menteuse car elle ne semble penser qu’à elle et à sa carrière. De retour en Corée du Sud, le temps d’un vertigineux cauchemar (une scène qui donne de nombreux frissons intimes), Sung-nam comprendra le chemin sentimental parcouru et d’une phrase d’une honnêteté absolue (enfin), scellera son amour pour sa femme, elle aussi manipulatrice, pour le bien de tous, certes, mais d’abord pour sien. Que l'on soit fétichiste des pieds, amoureux transis des femmes ou juste humain, le cinéma d'Hong Sang-Soo fait du bien.

par Yannick Vély

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