DVD: My Entire High School Sinking into the Sea
États-Unis, 2017
De Dash Shaw
Scénario : Dash Shaw
Avec : Jason Schwartzman
Durée : 1h17
Quel que soit votre âge, il y a une part en vous qui ne quitte jamais vraiment l'école, pour le meilleur et pour le pire. Dans My Entire High School Sinking into the Sea, un groupe d'amis tente de surmonter ses différences, s'appuyant les uns sur les autres en temps de crise.
UN COLLÈGE FOU, FOU, FOU
Jeune génie du roman graphique contemporain, l'Américain Dash Shaw (lire notre entretien) s'est fait remarquer il y a quelques années avec le fascinant pavé Bottomless Belly Button, une chronique familiale qui ne ressemble à aucune autre chronique familiale. Comment son univers très particulier allait-il s'exprimer au cinéma ? My Entire School Sinking Into the Sea répond de manière limpide à cette question - ce premier film est du pur Dash Shaw transposé sur grand écran. Les premiers instants du film, avec ses décors en coupe, ses trajets de personnages "à plat" dans l'espace, font des clins d’œil à la bande dessinée. Le film assume tout à fait cela: le crayonné est volontairement visible (apportant un aspect énervé au dessin, prêt à exploser) et on pourrait presque toucher le volume de la peinture étalée au second plan.
My Entire School Sinking Into the Sea réunit deux genres en un: le film catastrophe et la college comedy. Ce n'est pas une façon de parler, car My Entire School... ne lésine pas sur la cata: l'école, suite à des secousses sismiques, coule bel et bien en mer, on y crame, on s'y noie, et on doit si possible éviter de se faire déchiqueter par les requins qui passent. De la college comedy, My Entire School... secoue les archétypes - il n'est guère question ici pour le héros semi-loser de séduire la plus belle fille du lycée ; à vrai dire Dash Shaw carbure plutôt à l'inversion et la carbonisation anarchiste des codes : l'héroïne la plus impressionnante ici est sans nul doute... une dame de cantine ultra-badass qui bastonne les marlous comme un personnage de beat them all de la fin des 80s.
On parlait plus haut de "pur" Dash Shaw en version ciné, My Entire School... dépeint effectivement, comme dans ses bandes dessinées, l'épique derrière le quotidien absurde. Il y a un méchant sens du détail dans ce premier essai qui est particulièrement jubilatoire. C'est ainsi qu'on raconte comment quelques ados deviendront adultes: le film est à la fois abstrait (par sa technique d'animation), concret (par son propos sur la jeunesse et l'altérité) et quelque part entre les deux (lorsque l'école coule, la peinture des dessins coule aussi, comme si le film lui-même trempait dans l'océan). Il y a à l’œuvre ici un glorieux cynisme à la Daria, un goût du non-sens qui fait citer du Gertrud Stein tandis qu'on accomplit des acrobaties - ce mauvais esprit-là est politique. La contre-culture explosive d'un Body World trouve ici un équivalent filmique d'une inventivité formelle sans limite. Et le film réalise un rêve secret : qui n'a pas rêvé une fois dans sa vie de voir son propre lycée englouti ?
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Notre entretien avec le réalisateur Dash Shaw
My Entire High School Sinking into the Sea est désormais disponible en dvd chez Blaq Out.