Mission: Impossible - Rogue Nation
États-Unis, 2015
De Christopher McQuarrie
Scénario : Christopher McQuarrie, Drew Pearce
Avec : Tom Cruise
Photo : Robert Elswit
Musique : Joe Kraemer
Durée : 2h11
Sortie : 12/08/2015
L’équipe IMF (Impossible Mission Force) est dissoute et Ethan Hunt se retrouve désormais isolé, alors que le groupe doit affronter un réseau d’agents spéciaux particulièrement entraînés, le Syndicat. Cette organisation sans scrupules est déterminée à mettre en place un nouvel ordre mondial à travers des attaques terroristes de plus en plus violentes. Ethan regroupe alors son équipe et fait alliance avec Ilsa Faust, agent britannique révoquée, dont les liens avec le Syndicat restent mystérieux. Ils vont s’attaquer à la plus impossible des missions : éliminer le Syndicat.
NESSUN DORMA
Si Mission : Impossible - Rogue Nation s'inscrit toujours dans l'interprétation cinématographique de Mission : Impossible, à savoir une adaptation infusée d'une démesure et d'un protagoniste bondiens, ce cinquième volet des aventures d'Ethan Hunt ne ressemble pas vraiment à un blockbuster d'aujourd'hui. Composé davantage de scènes de tension que d'action, jusque dans un climax minimaliste mais fort, le film renoue avec l'esprit du chapitre original signé Brian de Palma et, peut-être même plus encore, avec l'esprit de la série télévisée. Avec le cinéaste derrière The Way of the Gun et Jack Reacher à la barre, l'objet se transforme en hommage aux classiques. Les deux premiers longs métrages en tant que réalisateur de Christopher McQuarrie renvoyaient clairement aux '70s mais l'auteur semble remonter un peu plus loin ici, vers le pur film d'espionnage des années 60. Un parfum hitchcockien parcourt cette histoire d'espions obsédés, abandonnés, manipulés, abusés, fatigués, comme en témoigne cette magnifique scène d'opéra, sorte de version upgraded de la séquence similaire dans Quantum of Solace, où le film s'incarne dans la relation trouble qui lie Hunt à ce personnage féminin exemplaire, Ilsa Faust, au nom aussi badass que ses actions. Révélation du film, Rebecca Ferguson renvoie à la Ingrid Bergman de Casablanca et Les Enchaînés et apporte au film un côté romantique (et non une simple romance fonctionnelle) aussi old school que le reste.
On trouve donc ici ce qui manquait dans le précédent opus, Ghost Protocol, dont les morceaux de bravoure sont plus mémorables mais qui ne racontait pas grand chose et souffrait d'une intrigue et d'un méchant faiblards. Ici, chaque scène d'action ou de tension raconte une histoire. Ici, pas de vulgaire bad guy qui cherche la fin du monde mais un rival qui rappelle autant Blofeld que les ersatz de Bond comme le Silva de Skyfall. Un adversaire qui fait sens face à Hunt, sens dans l'histoire que choisissent de raconter McQuarrie et Drew Pearce. La présence du co-scénariste d'Iron Man 3 se ressent également dans le traitement métatextuel du personnage de Tom Cruise, assumé plus que jamais comme un génie increvable mais sans le côté super-héroïque vaguement risible du John Woo. Autour de lui, l'équipe existe tout en étant dissoute mais le film s'en sort mieux que ses prédécesseurs car le rôle de chacun est restreint à sa particularité (un cascadeur, un gros bras, un informaticien). On continue de regretter toutefois que la franchise délaisse l'utilisation des masques, pourtant la marque de fabrique du matériau original, qui le distingue qui plus est de la licence créée par Ian Fleming. Quoiqu'il en soit, c'est une nouvelle réussite pour cette saga à personnalités multiples.