Mission: Impossible 3
M:I:III
États-Unis, 2005
De J.J. Abrams
Scénario : J.J. Abrams, Bruce Geller, Alex Kurtzman, Roberto Orci
Avec : Billy Crudup, Tom Cruise, Laurence Fishburne, Michelle Monaghan, Simon Pegg, Maggie Q, Ving Rhames, Jonathan Rhys Meyers, Keri Russell, Philip Seymour Hoffman
Photo : Daniel Mindel
Musique : Michael Giacchino
Durée : 2h06
Sortie : 03/05/2006
L’agent Ethan Hunt espérait avoir tourné une page en quittant le service actif de la Force Mission Impossible pour un poste de formateur : pouvoir enfin mener une vie "normale", se consacrer tout entier à sa ravissante épouse, Julia. Mais il va très vite être obligé de reprendre du service, pour faire tomber le dangereux terroriste Owen Davian.
VOTRE MISSION, SI VOUS L’ACCEPTEZ…
Après avoir subi de nombreuses déconvenues de pré-production, dont un planning de tournage sans cesse repoussé, dû notamment à la défection de David Fincher puis de Joe Carnahan, puis une organisation incompatible avec les comédiennes Carrie-Ann Moss et Scarlett Johansson, le projet Mission: Impossible troisième du nom a enfin réussi à voir le jour, sous la houlette du réalisateur et scénariste J.J. Abrams, heureux créateur des séries télé à succès Alias et Lost. Car pour Tom Cruise le producteur, il est nécessaire, voire essentiel, d’obtenir derrière la caméra la vision de talents confirmés et à l’imaginaire vif, pour amener sa série à se démarquer des autres productions du même style — la saga James Bond en premier lieu. Aussi, engager Abrams pour mettre en image la troisième aventure de l’agent Ethan Hunt, relevait à la fois du défi et du génie stratégique et marketing. Après le sens de la démesure et du spectacle grandiloquent et outrancier de John Woo, il fallait revenir à un exercice visuel, certes époustouflant, mais sûrement moins tape-à-l’œil. Et puisque, désormais, les futurs grands réalisateurs (ou du moins « faiseurs ») d’Hollywood se nichent à la télévision, le choix de confier le bébé à celui dont le succès cathodique ne tarit pas était tout à fait logique. Abrams fait donc directement son entrée dans la cour des grands, par le biais d’un des blockbusters les plus attendus de l’année.
TRUE LIES
Le principe d’un troisième volet, pour ce genre de production, est de repartir sur de nouvelles bases — ou pour le moins s'y essayer. On sait que les seconds épisodes réutilisent souvent les codes des premiers opus, en les décomplexant au possible pour mieux coller à l’adage selon lequel une suite se doit d’être l'excès son prédécesseur. La tâche étant dès lors plus qu'ardue en cas de trilogie. En choisissant Abrams pour relever ce défi, Tom Cruise mise avant tout sur son passif aux commandes d'Alias (sorte d'héritier direct de la série Mission: Impossible). Abrams s'amuse donc à disséminer sur grand écran plusieurs échos du petit (l'apparition de Greg Grunberg; le personnage de Simon Pegg, identique à celui de Kevin Weisman; la très belle photo de Dan Mindel, qui rappelle les codes couleurs de la série…), mais donne aussi sa vision propre, s'attachant à prendre le titre Mission: Impossible au pied de la lettre. Ainsi, s'il livre le quota attendu d'explosions, de traîtrises et autres cascades improbables, Abrams prend le parti de se placer du point de vue de l’homme et non du point de vue de l’espion. La mission s'en trouve reléguée à son statut accessoire, pour mieux mettre en valeur l'intrigue amoureuse. Bien sûr, Ethan Hunt continue à décaniller quelques méchants terroristes, à user et abuser de gadgets et à brouiller les pistes. Mais la patte Abrams est bien là: tout comme Alias cinq ans auparavant, l'intrigue conjugale est au moins aussi importante que les galipettes d'espion. D'aucuns y verront sans doute de la fainéantise. Ils se consoleront en constatant que le budget et l'ampleur des explosions ont été revus à la hausse: le spectacle est au rendez-vous.
CRUISE CONTRÔLE
Qui dit nouvelle mission, dit nouvel adversaire. Pour que l’agent Ethan Hunt ait vraiment la possibilité d’exprimer ses talents de chien fou, il lui fallait un adversaire à sa hauteur. Philip Seymour Hoffman s’y colle et, pour la première fois dans l’histoire de la série, compose un bad guy valant vraiment le détour. A chacune de ses apparitions, l'acteur bouffe l’écran et transcende son personnage. Tour à tour calme, mesuré, froid, mais aussi violent et machiavélique, le comédien incarne avec le raffinement et la subtilité qu’on lui connaît un méchant qui paraît sans faille. On en viendrait à regretter que sa présence soit si peu exploitée: logique, la vedette, ici, c'est Tom Cruise. Devenue au fil des épisodes une ode à la gloire de l'acteur, la saga en exacerbe ici l'ego. Tom Cruise sera donc toujours Tom Cruise: une star avec tout ce que cela suppose, mais aussi un calculateur, se taillant des rôles sur mesure, toujours prêt à donner de sa personne avec un talent et un charisme que peu de comédiens possèdent. A lui dévolu, Mission: Impossible 3 remplit parfaitement son cahier des charges d’entertainer pré-estival: découpage efficace et rythme millimétré, passages obligés et gros plans sur la star prenant des risques... Après tout, c'est exactement ce qu'on était venu voir.