Les Mille et une nuits - l'inquiet

Les Mille et une nuits - l'inquiet
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Mille et une nuits - l'inquiet (Les)
Portugal, 2015
De Miguel Gomes
Durée : 2h05
Sortie : 24/06/2015
Note FilmDeCulte : *-----
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Où Schéhérazade raconte les inquiétudes qui s'abattent sur le pays : « Ô Roi bienheureux, on raconte que dans un triste pays où l'on rêve de baleines et de sirènes, le chômage se répand. La forêt brûle la nuit malgré la pluie et hommes et femmes trépignent d’impatience de se jeter à l'eau en plein hiver. Parfois, les animaux parlent, mais il est improbable qu’on les écoute. Dans ce pays où les choses ne sont pas ce qu'elles semblent être, les hommes de pouvoir se promènent à dos de chameau et cachent une érection permanente et honteuse ; ils attendent qu’arrive enfin le moment de la collecte des impôts pour pouvoir payer un sorcier qui… ». Et le jour venant à paraître, Schéhérazade se tait.

LA NUIT LA PLUS LONGUE

Ce n’est pas exagéré de dire que le nouveau film de Miguel Gomes faisait partie des plus attendus de cette édition cannoise. D’une part à cause sa durée fleuve (sept heures, réparties sur trois films !), promettant une ambition hors norme, mais aussi grâce au souvenir de son superbe Tabou, succès surprise de 2012. L’attente était si fébrile que d’aucuns se sont vivement émus, alors que le film n’avait même pas encore été vu, de son absence en compétition officielle. Maintenant que la Quinzaine des réalisateurs en a présenté le premier volet (L’inquiet), cette non-sélection prend tout son sens. Ce n’est pas seulement que ces 1001 nuits sont trop longues, c’est surtout que le film, du moins dans sa première partie, est un intolérable pensum, rien de moins.

La cruelle déception face au retour de Miguel Gomes (que l’on espérait en fanfare) n’a d’égal que l’ennui indélébile provoqué par un objet filmique certes libre, mais surtout sans queue ni tête. A ce titre, la première demi-heure a de quoi faire blanchir les cheveux sur la tête - Gomes y raconte péniblement à la première personne son incapacité à démarrer son film, semblant improviser un amalgame d’images documentaires laides et arides, noyées sous une cacophonie de voix-off qui nous prévient en boucle : ceci va être un film sur le Portugal d’aujourd’hui, avec Gomes dans le rôle de notre Schéhérazade du 20h.

Quand le film débute enfin vraiment, la fiction reprend le dessus sous forme de contes absurdes, de paraboles politiques farfelues, à la poésie plus ouvertement bouffonne que vraiment classe (les membres du FMI y souffrent de problèmes très touche-pipi). Un peu comme dans son précédent film, Gomes utilise la fiction, même la plus archaïque (le conte, l’humour gras), pour documenter le réel le plus contemporain. Et pourtant au final, ces 1001 nuits deviennent l’anti-Tabou : la mise en scène, très terre-à-terre, ne participe plus à créer du merveilleux. Sur ce coup-là, la source de magie de Gomes semble complètement tarie et aride. On espère que c’est momentané, et on espère retrouver le réalisateur dans des projets plus généreux que ce collage incompréhensible et fatigant.

par Gregory Coutaut

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