Mercano le Martien

Mercano le Martien
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Mercano le Martien
Mercano, el marciano
Argentine, 2002
De Juan Antin
Scénario : Juan Antin, Lautaro Núñez de Arco
Avec : Ayar Blesco
Durée : 1h15
Sortie : 05/05/2004
Note FilmDeCulte : ****--

Alors que Mercano, Martien simplet à tête de cornichon, promenait son chien, la sonde Voyager s’est écrasée sur l’animal. Furax, el marciano prend son pistolet laser, grimpe dans sa navette et fonce vers la planète bleue pour régler ses comptes avec elle. Seulement, une fois arrivé sur place, en Argentine, plus moyen de repartir. Et les Terriens sont des gens tellement… étranges!

MERCANO FUTURE

Une semaine après l’atomique Mondo Mulloy, le cinéma d’animation nous présente à nouveau ses trash desseins. C’est d’Argentine que nous vient cette fois la livraison subversive, après avoir transité avec succès par Gérardmer et surtout Annecy (mention spéciale d'encouragement du jury). Film à budget modique, comme souvent lorsqu’on touche au cartoon engagé, Mercano le Martien est un miraculé dans l’espace économique dévasté argentin, sans toutefois qu’il dépare dans le renouvellement culturel et précisément cinématographique du pays. Crise oblige, Mercano est un film de dépression, d’apocalypse, agité de l’énergie ironique du désespoir. Exploitant le vieux tuyau scénaristique de la confrontation des mœurs martiennes et terriennes (astuce employée justement par Mulloy, avec les Zogs de son diptyque Intolerance), dans un esprit narratif et graphique proche de l’univers du bédéaste Lewis Trondheim, Juan Antin et sa petite bande d’animateurs chevronnés et masochistes (monter un dessin animé en Argentine par les temps qui courent relève du bénévolat) livrent un instantané acide et violent de leur société libérale et corrompue. Une liberté d’esprit rare, rappelant évidemment celle d’un South Park, et une indépendance financière autorisant un jusqu’au-boutisme bienvenu, qui leur permettent d’éviter le syndrome du désamorçage moral de fin de course à la Lilo & Stitch.

LE NERD DE LA GUERRE

Le développement chaotique et le financement ric-rac ont également laissé des traces moins heureuses sur le produit fini. Ainsi, en dépit d’un scénario fort bien ficelé, de quelques bonnes idées visuelles, d’un character design pertinent et de dialogues percutants, Mercano le Martien est par moment limité par la faible envergure de ses moyens. A la différence d’un Phil Mulloy ou d’un Bill Plympton, dont la démarche artistique est intimement liée à la nécessité de minorer les coûts (Mulloy et Plympton travaillent la plupart du temps seuls, à l’économie), Juan Antin et son directeur de l’animation Ayar Blesco ont de temps à autre les yeux plus gros que le ventre (angles et mouvements de caméras audacieux, séquences en images de synthèse…). Le résultat est en conséquence parfois mitigé, car disparate et grevé de légères baisses de rythme, notamment dues à un travail pas suffisamment poussé sur la bande-son. Reste que, dans l’ensemble, la satire atteint souvent sa cible, parce qu’elle a l’intelligence de ne pas être univoque. Ainsi, le noyau dur de personnages terriens – un petit groupe de nerds à la rébellion fainéante, que l’on identifie sans mal à d’autres nerds à l’origine de notre Martien échappé d’une animation en Flash – ne cesse d’être confronté à ses propres contradictions (attraction/répulsion envers la technologie marchande et ses plaisirs synthétiques) et à sa propre appartenance au système. Antin n’épargne donc personne, pour aboutir logiquement à l’apothéose d’un final en forme de parodie de comédie musicale, dont l’issue catastrophique agitera durablement les zygomatiques les plus crispés. Aussi, malgré ces menues scories, on n’attend plus que Mercano remette ça, à l’occasion.

par Guillaume Massart

En savoir plus

Mercano a vu le jour à la télévision argentine, sur la chaîne Much Music TV, sous forme d’interludes animés de deux minutes. L’idée d’en faire un long métrage n’est venue que suite au succès d’audience récolté par la série.

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