May
États-Unis, 2002
De Lucky McKee
Scénario : Lucky McKee
Avec : Angela Bettis, James Duval, Anna Faris, Kevin Gage, Nichole Hiltz, Jeremy Sisto
Durée : 1h34
Sortie : 10/03/2004
May est une jeune femme solitaire qui travaille dans une clinique vétérinaire. Elle n’arrive à vraiment communiquer qu’avec une poupée enfermée dans une boîte en verre que lui a offert sa mère lorsqu’elle était enfant. Elle fait la rencontre d’Adam, un mécanicien dont elle admire les belles mains. Intrigué par cette fille bizarre, il commence à sortir avec elle…
MIROIR
L’image que l’on donne aux autres et celle que l’on a de soi. L’amour, la haine qu’on lui porte. Et la création d’un modèle parfait. Dans May il y a tout cela. La quête de la jeune May n’est pas autre chose que celle de la reconnaissance. Si elle s’invente des amis de toutes pièces, c’est que son étrangeté l’empêche d’avoir une vie sociale orthodoxe. Le fétichisme lui sert de remède. Mais la normalité n’est pas toujours celle que l’on croit. La relative neutralité de May lui permet d’observer la folie et les comportements aberrants des personnages qui l’entourent. A l’image d’Adam, fan de films d’horreur qui se la joue rebelle mais est effrayé par son attitude inhabituelle. Ou de sa collègue lesbienne volage fascinée par toutes les sortes de déviances sexuelles. Ce décalage permanent de May avec son environnement, sa volonté de s’en sortir malgré tout, prêtent à sourire. Même les situations classiques de la vie ordinaire, comme son travail d’assistante d’un drôle de vétérinaire, ne font que souligner sa différence. Ces scènes du quotidien sont toutefois inégales et ne brillent pas toujours par leur pertinence. Mais ces éléments de comédie ne sont au fond que des apparences précaires. Le personnage de May est plus inadapté qu’il n’y paraît. Et lorsque les difficultés et les désillusions s’amoncellent, son déclin n’en est que plus pénible.
REFLETS
May est un personnage passionnant, formidablement incarnée par Angela Bettis, révélation absolue. Touchante et effrayante à la fois, imprévisible et cohérente dans sa logique, on ne l’oublie pas. Cet attachement viscéral à ce personnage vient même fausser la perception qu’on peut avoir du film. Derrière la fragilité de la femme-enfant se cache un potentiel de violence déconcertant. Il s’agit probablement d’une volonté manifeste du réalisateur: les tribulations de May choquent d’autant plus que le spectateur s’est attaché à elle. C’est à ce moment que l’édifice savamment construit par Lucky McKee prend toute son ampleur. De ce paradoxe naît toute l’admiration, ou le dégoût, et parfois les deux simultanément, qu’on peut avoir pour May, le film. Susciter deux émotions aussi antagonistes relève en soi de l’exploit. L’humour noir se transforme alors en poésie macabre. La dure réalité de la vie laisse la place au fantastique. Et le rêve prend définitivement le dessus sur le monde tangible, à l’instant même où le film s’achève. Fin magnifique, mais réveil douloureux.