Mariage de Tuya (Le)
Tu Ya De Hun Shi
Chine, République populaire de, 2007
Scénario : Lu Wei
Avec : Sen'ge, Peng Hongxiang, Yu Nan
Durée : 1h32
Sortie : 19/09/2007
Tuya est bergère dans le désert de la Mongolie intérieure. Elle doit s’occuper seule de ses cent moutons, de ses deux enfants et de son mari, incapable de travailler à la suite d’une blessure. Elle finit cependant par tomber malade et décide alors de chercher un autre mari pour l’aider à s’occuper des lourdes tâches quotidiennes.
A LIFE NOT ORDINARY
Le Mariage de Tuya, Ours d’Or de la 57ème édition de la Berlinale, est le troisième film de Wang Quan’an, qui s’attache à chaque fois à dépeindre la réalité sociale en Chine de nos jours. Sa maman est originaire de Mongolie intérieure, où s’est tourné le métrage, et alors qu’il apprend que cette région est menacée à cause de l’expansion industrielle et de l’administration locale qui force les bergers à quitter les lieux pour se les approprier, il décide de leur consacrer un film avant qu’il ne soit trop tard. La plupart des acteurs, à l’exception de Yu Nan (Tuya), sont des amateurs et, à la fin du tournage, les maisons ont été démontées et tout a disparu. Ce film est leur dernier témoignage. Wang Quan’an réussit non seulement un bel hommage à un style de vie en perdition, il le double également d’une histoire romantique à la fois intelligente et amusante. Ainsi le spectateur découvre la dureté de la vie des bergers en Mongolie intérieure, rythmée uniquement par le travail: que ce soit la recherche de patûrage pour les moutons, aller puiser l’eau à trente kilomètres de la maison, faire à manger, s’occuper des enfants et enfin s’asseoir pour tomber de fatigue. Le mot temps libre n’existe simplement pas.
Tuya n’a pas une vie facile mais ne se plaint pas pour autant. C’est seulement à bout de force qu’elle envisagera de chercher un autre mari. Celui-ci devra toutefois accepter de s’occuper de Bater, le mari numéro un. Commence alors la ronde, pleine d’humour, des prétendants et Tuya se prend à rêver du prince charmant. Le spectateur se rendra compte que la quête de Mister Right n’est pas plus simple en Mongolie et que l’herbe semble décidément toujours plus verte ailleurs. Entre loyauté et envie le choix se fait hardu et la recherche du bonheur aura en conclusion une saveur douce-amère. L’actrice Yu Nan a tourné dans chacun des films de Wang Quan’an et a tenu le rôle principal de la production française Fureur en 2003. Elle imprime la pellicule de son incroyable présence et incarne Tuya avec tant de conviction qu’il semble difficile de croire qu’il s’agisse d’un rôle de composition. Bater symbolise la résignation d’un homme obligé d’abandonner une vie traditionnelle alors que Sen Ge (le voisin) apporte de la vitalité et une certaine légèreté doublée de maladresse à l’histoire. Tous deux sont des amateurs et Sen Ge est un vrai berger. Les cadres reflètent l’aridité du désert mongole, qui contraste fortement avec l’intérieur de la yourte où réside la famille de Tuya. Wang Quan’an ne fait pas dans le sentimentalisme à propos des traditions qui se perdent, il se contente de dépeindre les faits, et l’inexorable évolution de notre société qui semble ne pas vouloir se souvenir plus que nécessaire d’où elle vient.