Festival de Gérardmer: The Man in the Orange Jacket

Festival de Gérardmer: The Man in the Orange Jacket
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Man in the Orange Jacket (The)
Lettonie, 2014
De Aik Karapetian
Scénario : Aik Karapetian
Durée : 1h11
Note FilmDeCulte : ***---
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Suite à son licenciement, un jeune homme poursuit à la trace son ancien patron et sa charmante épouse. Au travers d’événements tous plus sanglants les uns que les autres, il tente d’échapper à son propre passé et, en s’installant dans la superbe demeure de son patron, de se construire une nouvelle identité en y menant une vie luxueuse. Mais rien ne le prépare à la visite surprise d’un invité qu’il semble vaguement connaître…



ORANGE IS THE NEW BLACK

Le long prologue de The Man in the Orange Jacket présente ses personnages de loin : d'abord le "héros" éponyme, sans nom, avec sa veste de chantier orange à bandes réfléchissantes, faisant partie, on l'imagine, des centaines d'employés licenciés, et puis son patron, vaguement tourmenté par la précarité des familles concernées, contrairement à sa jeune épouse frivole qui balaie ses inquiétudes d'un geste de la main. Qui sont-ils, quelles sont leurs motivations et comment le spectateur peut-il s'attacher à eux ? Cet uniforme de chantier va-t-il devenir un costume iconique, le symbole d'une revendication ? Ces questions sont volontairement laissées de côté. Le prologue se poursuit d'ailleurs, en embrayant directement sur des scènes d'actions sanguinolentes qui auraient constitué le point d'orgue de tout autre film sur un tel sujet. Le générique de début intervient ainsi assez tardivement ; volontairement long, il annonce la couleur : c'est maintenant que le film commence. À moins que ce soit un générique de fin ? Que se passe-t-il "après" ?

C'est effectivement sur le personnage principal que le scénariste et réalisateur Aik Karapetian souhaite s'attarder. Mais là encore, les attentes du spectateur sont désamorcées : on n'aura pas droit à une explication sur ses actes et encore moins à une véritable étude psychologique ou sociologique, même si les perches auraient pu facilement être tendues. À ce moment du film, le spectateur a donc déjà eu plus d'une occasion de lâcher le fil ténu de cette narration ou d'abandonner tout lien avec le protagoniste, qui n'est ni sympathique, ni même détestable. Mais petit à petit, la musique et les effets sonores, qui avaient pu paraître au début du film un peu forcés, trop présents, trop travaillés, sont devenus quasiment des personnages à part entière. Progressivement, ce qui semblait artificiel au départ a pris une place importante dans la mise en scène, et c'est par ce biais que le film opère sa vraie réussite : amener une peur, un effroi, grâce à quelque chose de sensitif et de brut, sans passer par les ficelles classiques que sont d'une part l'identification, et d'autre part les effets divers et variés que peuvent être les chocs, sursauts, surgissements, créatures. Les sons grinçants et sourds que l'on entend sont-ils ceux de la bande originale ? Ceux d'une machine déréglée dans un sous-sol ? Ceux d'une machine infernale terriblement inaccessible ?

Malheureusement, la 3ème partie et ses personnages supplémentaires se raccrochent difficilement au cheminement de cet homme qu'on avait enfin réussi à suivre. S'agit-il d'explorer ses fantasmes ? Ses angoisses ? Sa médiocrité ? Tout semble tout à coup trop trivial après ce qui vient d'être montré. De la même manière, le chapitre final semble être une conclusion presque facile à ce tableau, au point qu'on en vient à se demander s'il y a eu une ellipse ou au contraire une distorsion temporelle - l'hypothèse tient la route, mais n'a pas grand intérêt. Ainsi, après une première moitié un peu âpre, le film laisse finalement une sensation d'inabouti, bien que le récit trouve une réelle résolution : c'est presque finalement en cela qu'il en devient décevant. Pas vraiment réussi, difficile d'accès par sa façon de ne pas jouer les cartes narratives attendues et souvent pénible par sa lenteur, The Man in the Orange Jacket est néanmoins marquant par son extrême exigence et son refus des compromis.

par Anne Mourand-Sarrazin

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