Magdalene sisters (The)
, 2003
De Peter Mullan
Scénario : Peter Mullan
Avec : Anne-Marie Duff, Dorothy Duffy, Geraldine McEwan, Nora-Jane Noone, Eileen Walsh
Durée : 2h00
Sortie : 05/02/2003
Irlande 1964. Margaret, Bernadette et Rose sont emmenées de force dans un couvent des soeurs de Marie-Madeleine pour expier des fautes qu'elles n'ont pas commises.
LE CHOC DES MAUX
A l’origine du film, un fait divers édifiant. Jusqu’en 1996, des dizaines de milliers de jeunes femmes irlandaises ont été enfermées contre leur gré dans des couvents transformés en prison, les institutions religieuses de Marie-Madeleine. Emu par un documentaire sur les destins terrifiants de ces femmes condamnées pour des crimes qu’elles n’avaient point commis, le comédien écossais Peter Mullan signe un film choc aux images parfois insoutenables. Acteur fétiche de Ken Loach (Riff-Raff, My Name is Joe), il a retenu de son mentor anglais le goût du cinéma-combat. Pour une cause juste, tous les moyens sont bons et le cinéma, par son caractère universel, reste un médium privilégié pour faire connaître au monde entier une vérité longtemps dissimulée. Lion d’or de la Mostra de Venise 2002, The Magdalene Sisters a provoqué une vive polémique en Italie, le Vatican accusant le réalisateur de manichéisme primaire. Hélas pour les grenouilles de bénitiers, de nombreuses langues se sont déliées, notamment en Grande-Bretagne où le long métrage a battu des records d’affluence pour un film d’auteur.
LE POIDS DU PATHOS
Après une introduction poignante de non-dits, de passivité familiale devant la domination masculine, Peter Mullan nous plonge dans l’enfer quotidien de trois jeunes femmes séquestrées dans un asile pour pécheresses présumées. Il appuie là ou ça fait mal, montre le trafic organisé par l’Eglise, les petits plaisirs coupables de quelques prêtres défroqués. Pour accentuer le réalisme et donc le malaise, il opte pour une mise en scène sobre et rigoureuse sans effet inutile. Caméra portée, lumière blafarde, cadres stricts: impossible d’échapper aux brimades multiples et répétitives d’une mère-religieuse démoniaque. Chaque lueur d’espoir précède une punition de plus en plus exemplaire. Confondantes de vérité, les trois actrices principales apportent un peu de fraîcheur à un film suffocant. Avec elles, Peter Mullan reste pudique, presque en retrait. A l’inverse, il n’épargne pas le personnage de Crispina qu’il accable de tous les malheurs possibles. Malgré quelques fautes de goût comme l’ajout inutile de la musique de Craig Armstrong pour souligner l’émotion et l’éprouvant plan final pour fixer à vie les consciences, The Magdalene Sisters reste un film courageux et essentiel par le débat qu’il a su provoquer.
En savoir plus
Les Magadalene Homes ont été fondées en Irlande au 19e siècle. Au début du 20e siècle, l'Eglise plaça les couvents sous la direction des Soeurs de la Miséricorde qui transformèrent l'établissement en laveries. Abandonnées par leur famille, les jeunes femmes pensionnaires devaient travailler dix heures par jour, sept jours sur sept sans jamais rechigner à la tâche. D'après les estimations des autorités irlandaises, près 30 000 femmes moururent dans ces institutions. Le dernier établissement a fermé en 1996. Une cinquantaine de jeunes femmes occupaient encore les lieux.