K-19
K-19 : the widowmaker
États-Unis, 2002
De Kathryn Bigelow
Scénario : Christopher Kyle, Louis Nowra
Avec : Harrison Ford, Liam Neeson, Peter Sarsgaard
Photo : Jeff Cronenweth
Musique : Klaus Badelt, Geoff Zanelli
Durée : 2h18
Sortie : 18/09/2002
L'histoire vraie, en 1961, du premier sous-marin nucléaire soviétique, qui a à son bord des ogives nucléaires et un moteur à propulsion atomique. Ces armes devant rester à température ambiante sous peine d'explosion, le capitaine Vostrikov et son second Polenin vont tout mettre en œuvre pour éviter la catastrophe quand ils découvrent une panne du système de refroidissement. En effet, outre l'accident nucléaire, l'explosion engendrerait en plus une riposte américaine.
En adaptant au cinéma une histoire vraie restée cachée pendant 28 ans, Kathryn Bigelow s’est en quelque sorte lancée dans son Titanic à elle. Sous-marins de diverses tailles, 150 acteurs-hommes d’équipage sous ses ordres, sans compter l’équipe technique, conseillers russes, fouillage d’archives, effets spéciaux, elle a tout supervisé. Devant un tel déploiement de moyens, on est donc un peu déçus au vu du résultat. Car si le film est de qualité, il est assez inégal et ne passionnera pas les foules.
En effet, Bigelow joue plus sur les personnages que sur l’action, mais sur plus de deux heures, le film devient difficile à remplir. Harrison Ford et Liam Neeson offrent, comme à leur habitude, une interprétation irréprochable : Ford est convaincant en commandant expert et intransigeant, tout en intériorité, et Neeson tout autant en second proche de l’équipage. Cependant leur forte présence, leur charisme (surtout Ford) écrasent vite leurs personnages. Et les situations n’aident pas toujours à y croire non plus, le film a beau être long, certains bouleversements sont un peu trop rapides et difficilement crédibles.
On voudrait s’attacher à eux, à tout l’équipage, embarqués sur un sous-marin nucléaire en pleine guerre froide, un sous-marin qui a déjà entraîné la mort d’une dizaine d’hommes avant même de quitter le port, et qui porte parfaitement son surnom : "the widowmaker" – "le faiseur de veuves" (oubliez l’inepte titre français!), mais on n'y arrive que difficilement. Seuls les deux gros moments d'action nous plongent enfin au cœur de l'intrigue, nous font nous intéresser à eux. Mais si Bigelow arrive à nous accrocher, elle ne maintient pas la tension et la lenteur du film reprend le dessus. Ainsi, nous alternons moments captivants et ennui sur 2h20, et la longueur se fait vraiment sentir sur la fin.
C'est d'autant plus dommage que les effets péciaux sont soignés, voire invisibles, la réalisation également, la caméra caressant le sous-marin dans des tons bleutés qui ne sont pas sans rappeler, encore une fois, James Cameron et son influence toujours présente sur son ex-femme, influence qu'on pouvait déjà remarquer par exemple dans Point break . Après l'original et très réussi Strange days en 1995, il semble donc que Bigelow ne se précipite pas sur les projets (entre temps elle n'a tourné que le moyen Poids de l'eau en 2000), ce qui pourrait être un gage de qualité, mais simultanément, elle semble aussi ne pas approfondir son expérience et rester trop éloignée des plateaux, et du public.
En savoir plus
Artiste à part entière, Kathryn Bigelow commença par la peinture avant de se lancer dans le cinéma, en tant que réalisatrice mais aussi scénariste et même actrice, adhérant à divers mouvements culturels. Elle doit être la seule femme qui réalise des "films d'hommes": de Point break à celui-ci, en passant par Near dark, Blue steel ou le sublime Strange days, même si bien sûr elle y insuffle une sensibilité toute féminine, les films sont musclés et très loin de la guimauve que font certaines autres femmes réalisatrices. Epouse de James Cameron de 89 à 91, la belle brune fit appel à sa collaboration après leur divorce (il signa le scénario de Strange days en 95) et garde dans tous ses films une certaine influence de son ex-mari.