Jojo Rabbit
États-Unis, 2019
De Taika Waititi
Scénario : Taika Waititi
Avec : Roman Griffin Davis, Scarlett Johansson, Thomasin McKenzie, Stephen Merchant, Sam Rockwell, Taika Waititi, Rebel Wilson
Photo : Mihai Malaimare Jr
Musique : Michael Giacchino
Durée : 1h48
Sortie : 29/01/2020
Jojo est un petit allemand solitaire. Sa vision du monde est mise à l’épreuve quand il découvre que sa mère cache une jeune fille juive dans leur grenier. Avec la seule aide de son ami aussi grotesque qu'imaginaire, Adolf Hitler, Jojo va devoir faire face à son nationalisme aveugle.
AFFREUX JOJO
Les premières affiches de Jojo Rabbit revendiquaient fièrement la démarche du film : une satire anti-haine. Rarement satire n'a eu les dents aussi limées. Pour déranger ou même simplement être un tant soit peu mordant, l'on ne peut se contenter de caractériser ses nazis de façon plus parodique que dans Top Secret! des ZAZ. La dérision présente est clairement davantage l’œuvre du paresseux responsable de Thor Ragnarok que de l'amusant Vampires en toute intimité. Pour donner une idée de ce que Taika Waititi voit comme de la subversion, le summum de l'humour semble résider pour lui dans le fait de faire répéter "Heil Hitler!" à un enfant jovial pour s'entrainer ou de faire répéter "Heil Hitler!" (oui, encore) de façon absurde lors de salutations entre plusieurs personnes. Quand on demande à Waititi, Maori et juif, pourquoi il a tenu à jouer le dictateur lui-même, il répond "Quelle meilleure manière de l'envoyer chier?". C'est dire le niveau. Ce que le cinéaste prend pour de la subversion s'avère en réalité un film tout à fait consensuel. À côté d'un Borat, dont il partage le goût de la caricature de l'antisémitisme, Jojo Rabbit est incroyablement petit-bras.
D'aucuns argueront que la véritable vocation du film est d'être un coming of age story mais quand bien même on laisserait de côté l'embarrassant décalage forcé et conscient de soi, aucun semblant de surprise ne pointe le bout de son nez dans ce récit convenu et ennuyant suivant la rencontre entre L'Enfant qui voyait Hitler comme ami imaginaire et Anne Frank-lite. Non content de faire preuve d'un humour paresseux et pourtant content de lui, le film rate également son virage dramatique, se vautrant dans un sentimentalisme aussi grossier que le reste. Ainsi, Jojo Rabbit révèle sa véritable nature de feel-good movie qui se croit plus signifiant qu'il ne l'est alors qu'il n'est que facilité, caressant le grand public dans le sens du poil. En quelque sorte, c'est le Green Book de cette année. Pas étonnant qu'il soit nommé aux Oscars.