Jean Dominique, the agronomist

Jean Dominique, the agronomist
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Jean Dominique, the agronomist
The Agronomist
États-Unis, 2003
De Jonathan Demme
Scénario : Ahn Sang-Hoon
Avec : Jean Dominique, Nadine Dominique, Micheline Dominique-Billot, Madeleine Dominique-Pallière, Michèle Montas
Durée : 1h27
Sortie : 31/03/2004
Note FilmDeCulte : ****--

Documentaire sur le journaliste Jean Dominique, directeur de Radio Haïti Inter à partir de 1968, qui deviendra la première radio libre de l'île introduisant l'utilisation du créole.

HAITIAN CORNER

Fruit d'un projet entre le réalisateur et Jean Dominique, The Agronomist est un portrait du journaliste, de sa femme, Michèle Montas, et derrière eux, d'un pays meurtri par des années de luttes incessantes contre des dictatures et le non respect des droits de l'homme. Concerné par le sort de Haïti depuis 1986, Jonathan Demme décide de réaliser un premier documentaire intitulé Haitian, Dreams of Democracy et profite de ce tournage pour rencontrer le couple à la tête de Radio Haïti Inter. En 1993, alors que Jean et Michèle sont en exil pour la deuxième fois à New York, le cinéaste prend de nouveau contact avec eux et leur propose de mettre en place des séances d'interview de Jean Dominique, dans le but de réaliser un documentaire sur l'homme et son exil. Ces conversations filmées en vidéo se dérouleront pendant un an et prendront fin lors du retour du couple en Haïti en 1994. Les images restent en suspens dans l'attente d'une nouvelle rencontre, mais Jean Dominique est assassiné le 3 avril 2000 sans que le documentaire n'ait pu voir le jour. Avec l'aide de Michèle Montas, des sœurs et de la mère de Jean, ainsi que l'association Reporters sans frontière, Jonathan Demme a décidé de finir ce document, de dévoiler la vie et le combat de cet ami dans The Agronomist, comme une sorte d'hommage.

L'HISTOIRE ET SES MYSTERES

Pour ce documentaire, Jonathan Demme a non seulement ressorti ses vidéos de 1993 (environ vingt interviews), mais également différentes images d'archives glanées ça et là, des témoignages de la famille de Jean Dominique, ainsi que des extraits d'autres documentaires sur l'île (Un People in Haïti 1996, Droit à la parole 1984 ou Rezistans 1997) et deux fictions Haïtiennes ayant fait date dans l'histoire du pays: Mais, je suis belle (1962, co-réalisé par Jean Dominique) et Anita (1981). Dans un patchwork filmique, il retrace la vie du journaliste, son engagement pour son pays, son combat, sa relation avec Michèle Montas et ses deux exils. Si les sources sont disparates, leur montage chronologique et le caractère quasi mythique de leur fil directeur les rendent parfaitement cohérentes. Il en résulte un réel témoignage historique des plus intéressants. Le seul regret portera sur le parti pris du réalisateur de ne montrer les faits qu'au travers du regard de Jean Dominique et de ses proches. Un portrait unilatéral donc, qui laisse en suspens quelques questions, concernant notamment les rapports politiques qu'entretenait le journaliste avec le père Aristide après son retour en 1994. Des interrogations sans doute volontairement laissées de côté compte tenu du mystère qui entoure la mort de l'homme et de la possible implication de l'état dans cet assassinat.

par Julie Anterrieu

En savoir plus

Repères chronologiques

1804 Indépendance d'Haïti. 1934 Départ des troupes américaines, mais l'influence du gouvernement US puis de la CIA se feront toujours ressentir dans la politique haïtienne. 1956 Coup d'Etat de François Duvalier (Papa Doc) qui gouverne avec le soutien de son armée de volontaires de la Sécurité nationale, les tontons macoutes. 1964 François Duvalier s'autoproclame président à vie 1968 Jean Dominique prend la direction de Radio Haïti Inter. 1971 Jean-Claude Duvalier (Bébé Doc) succède à son père et devient président à vie à l'âge de 19 ans. 1980 Premier exil de Jean Dominique. 1986 La pression populaire force Jean-Claude Duvalier à fuir Haïti et Jean Dominique rentre d'exil. 1990 Après une transition militaire, première élection libre organisée en Haïti: Jean-Bertrand Aristide est élu président. 1991 Le général Raoul Cedras renverse le gouvernement Aristide qui s'exile. Jean Dominique et Michèle Montas partent pour New York. Le gouvernement américain appelle à la défense de la démocratie, mais ne s'oppose pas au nouveau régime et refoulent les haïtiens qui tentent de fuir par voie maritime. 1993 Signature d'un accord entre Aristide et Cedras sous la pression internationale 1994 Cedras met fin à l'accord, les troupes américaines interviennent pour permettre le retour d'Aristide. Jean Dominique et sa femme rentrent en Haïti. 1995 René Préval est élu président. 2000 Second mandat d'Aristide. 3 avril, assassinat de Jean Dominique devant sa station de Radio.

Conspiration d'Etat?

C'est une enquête forte en rebondissement qui entoure la mort de Jean Dominique, le meurtrier n'étant toujours pas arrêté malgré quatre années d'investigation et de nombreuses assignations en justice. Les soupçons d'une conspiration d'Etat s'avèrent de plus en plus fondés au fur à mesure que les recherches avancent.

Septembre 2000, le juge Jean-Sénat Fleury se dessaisit du dossier après avoir reçu des menaces de mort. Novembre 2000, Jean Wilner, complice présumé de l'assassinat meurt d'une insuffisance respiratoire, son corps disparaît de la salle d'autopsie de l'hôpital de l'Université d'Etat. Décembre 2000, le ministre de la Justice déclare que quatre suspects ont été arrêtés, mais ne révèlent jamais leurs noms aux personnes chargées de l'enquête. Au cours de l'année 2001: Le nouveau juge d'instruction, Claudy Gassant, démissionne, critiquant le manque de moyens donnés par le ministre de la Justice pour garantir sa sécurité (il a plusieurs fois été menacé d'une arme par des représentants de l'Etat dont le député Millen Rommage du Fanmi Lavalas, parti du président Aristide). Il revient sur sa décision quelques jours plus tard sous la pression internationale. Le sénateur Dany Toussaint (une des personnalités du Fanmi Lavalas) est désigné comme principal suspect ce à quoi le Sénat et les partisans de l'homme répondent en dénonçant un complot supposé et demandent l'arrestation de Claudy Gassant. Parallèlement les avocats de Dany Toussaint engagent six actions judiciaires devant quatre instances différentes, ce qui ralenti considérablement l'enquête. Septembre 2001, le juge Gassant lance un mandat d'amener contre Paul Raymond et René Civil (deux responsables d'organisations populaires proches du Fanmi Lavalas) pour les entendre comme témoins. Les deux hommes organisent alors une conférence de presse. Parallèlement, Claudy Gassant apprend que la police judiciaire n'a pas donné suite aux mandats d'arrêts lancés contre Rochard Salomon et Franck Joseph (respectivement bras droit et garde du corps de Dany Toussaint), tout deux poursuivis pour leur participation présumée dans l'assassinat de Jean Dominique. Novembre 2001, Panel Rénélus, suspect important, est mis à mort par une foule de manifestants au lendemain de son arrestation sans que la police n'intervienne. Décembre 2001, Jean-Bretrand Aristide rencontre l'avocat de Paul Raymond et René Civil qui acceptent alors la convocation de Claudy Gassant. Janvier 2002, le sénat rejette la demande du juge Gassant de lever l'immunité parlementaire du sénateur Dany Toussaint. Au cours de l'année 2002, les juges d'instructions vont se succéder et aucune arrestation ne sera faite. Noël 2002, Michèle Montas est la cible d'une tentative d'assassinat qui se solvera par la mort de l'un de ses gardes du corps. février 2003, Michèle Montas et le personnel de Radio Haïti Inter ferment la station de radio pour s'exiler afin d'échapper aux menaces qui pèsent sur eux.

Depuis fin 2001, l'affaire stagne sans aucune arrestation ou investigation en bonne et due forme.

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