Festival CPH:Dox : Jane
A travers des images d'archive longtemps perdues, vie et œuvre de la primatologue Jane Goodall, pionnière dans les recherches sur les chimpanzés.
LE LIVRE DE LA JUNGLE
C'est le matériel rêvé pour un documentaire édifiant : Jane Goodall, sa vie et son œuvre en tant que primatologue pionnière dans l'étude des chimpanzés. Mais la réussite du très doué et éclectique Brett Morgen (The Kid Stays in the Picture et surtout l'excellent Cobain: Montage of Heck) est, avec ce Jane, d'être parvenu à constituer un documentaire pédagogique sans être scolaire. Jane retrace l'histoire hors du commun de cette frêle jeune femme de 26 ans, peu qualifiée, qui se lance dans une étude alors unique sur les chimpanzés en Tanzanie. C'est, à ce jour, la plus longue étude du genre en continu, et celle-ci a mené à de grandes découvertes. Le récit de Jane est ample comme peut l'être le combat d'une vie entière - combat qui s'exprime beaucoup par une minutieuse observation : celle des cycles de la vie, celle d'un monde invisible ; monde des minuscules chenilles filmées à répétition comme celui des singes qui ne s'offre pas si facilement à la jeune femme.
Le film parvient à capturer le sentiment de découverte et d'émerveillement de Goodall face aux mystères qui peu à peu se dissipent. "Les arbres sont vivants", agités par une faune qu'elle apprivoise peu à peu, bravant les dangers. Ce souffle s'exprime également par l'utilisation de la musique - celle-ci pourrait être redondante ou envahissante mais, lorsque la bande originale est signée Philip Glass comme c'est le cas ici, on sait que celle-ci sera actrice à part entière de la narration, comme une seconde voix derrière celle de l'héroïne.
Il y a une certaine émotion qui s'invite lorsque Goodall note similarités et différences entre humains et singes, notamment lorsqu'il est question de deuil. Mais ce qu'il y a de plus émouvant ici, ce sont peut-être ces images : des tonnes d'archives perdues et datant d'il y a des décennies, qui resurgissent comme un souvenir enfoui, dont les couleurs sont étrangement nettes. Et c'est presque un effet de surprise lorsqu'au visage de Jane Goodall jeune, dans une vidéo qui semble presque dater d'hier, succède celui de Jane aujourd'hui - cette grande vie qui semble être passée comme un souffle.