Les Indestructibles 2
Incredibles 2
États-Unis, 2018
De Brad Bird
Scénario : Brad Bird
Avec : Holly Hunter, Samuel L. Jackson, Craig T. Nelson
Musique : Michael Giacchino
Durée : 1h58
Sortie : 04/07/2018
Notre famille de super-héros préférée est de retour! Cette fois c’est Hélène qui se retrouve sur le devant de la scène laissant à Bob le soin de mener à bien les mille et une missions de la vie quotidienne et de s’occuper de Violette, Flèche et de bébé Jack-Jack. C’est un changement de rythme difficile pour la famille d’autant que personne ne mesure réellement l’étendue des incroyables pouvoirs du petit dernier… Lorsqu’un nouvel ennemi fait surface, la famille et Frozone vont devoir s’allier comme jamais pour déjouer son plan machiavélique.
LA FEMME EST L'AVENIR DU SURHOMME
Disons-le tout de suite : Les Indestructibles 2 n'est pas du niveau du premier. Mais c'est loin d'être Le Monde de Dory. Comme Andrew Stanton, Brad Bird se fait harceler depuis plus de dix ans par des fans réclamant une suite mais lui n'a pas fait mentir le cliché du "je le ferai seulement si j'ai une histoire à raconter". Quelle est cette histoire? Les mauvaises langues diront qu'il s'agit d'une simple inversion de l'intrigue du premier film - un riche mécène souhaite redonner du service aux super-héros et débauche l'un des parents Parr - mais en un sens, c'est précisément le propos. Certes, cela fait un moment que les femmes ne sont plus obligées de rester au foyer et que les papas poules existent et d'ailleurs, les gags qui montrent le père peiner à gérer ses trois enfants (les devoirs de l'un, les émois de l'autre, la turbulence du bébé) s'avèrent vaguement ringards. Le salut de cette trame un peu convenue se trouve dans la dévotion que Bird confère à son personnage masculin qui, bien que jaloux, ne remet jamais en question la position de sa femme, veut à tout prix réussir de son côté pour qu'elle puisse s'épanouir au travail, et ne cherche plus à être un héros mais juste "un bon père". Néanmoins, il est dommage que la résolution de cet arc-là se fasse rapidement, sans enjeu réel, les obstacles étant réservées à l'intrigue classique de gentils contre méchants.
À ce titre, le propos n'est pas sans rappeler certaines idées d'À la poursuite de demain. Lors d'un discours que l'on n'attendait pas dans un "film pour enfants", le méchant, baptisé Screenslaver (en VO hein, parce que les sous-titres le traduisent par un vulgaire L'Hypnotiseur), se lance dans une critique de l'hégémonie des écrans et de la soumission du peuple, renvoyant au discours de Bird sur les médias cultivateurs de pessimisme dans son précédent film. Ailleurs, on déplore que les gens soient plus intéressés par ce qui est facile et ce que l'on peut vendre plutôt que par ce qui est utile, le cinéma de l'auteur étant toujours peuplé de créateurs incompris. Toutefois, là aussi, cette thématique aurait mérité d'être plus fouillée plutôt que de retomber dans du face-à-face plus élémentaire.
Fort heureusement, les scènes d'action, et elles sont nombreuses, sont absolument remarquables. L'animation permettant les plus gros sauts de foi, chaque morceau de bravoure redouble d'inventivité et exploite de manière inattendue et jubilatoire les pouvoirs de ses personnages, notamment féminins. Et c'est là que le film se fait le plus intéressant, en mettant en avant le protagoniste féminin. L'écriture utilise habilement les capacités physiques de son héroïne, littéralement "hyper-flexible", pour asseoir sa supériorité sur le terrain en comparaison avec son mari dont le seul pouvoir est la force brute et donc plus prompte à commettre les dégâts qui sont reprochés aux super-héros. Cette simple idée est à elle seule une décomposition pertinente de la masculinité inhérente au genre. Outre le couple parental au coeur du film, un autre tandem, fraternel celui-là, permet lui aussi de montrer la différence dans la façon qu'ont un homme et une femme d'aborder le monde. Cette richesse narrative, en plus des prouesses formelles du film, font des Indestructibles 2 une suite aussi intelligente que divertissante, même si l'ensemble manque un peu de surprises.