Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés

Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés
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Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés
France, 2005
De Sophie Bruneau, Marc-Antoine Roudil
Scénario : Sophie Bruneau, Marc-Antoine Roudil
Avec : Christophe Dejours
Durée : 1h20
Sortie : 08/02/2006
Note FilmDeCulte : ****--

Chaque semaine, dans trois hôpitaux publics de la région parisienne, une psychologue et deux médecins reçoivent des hommes et des femmes malades de leur travail. Ouvrière à la chaîne, directeur d'agence, aide-soignante, gérante de magasin... Tour à tour, quatre personnes racontent leur souffrance au travail dans le cadre d'un entretien unique. Les trois professionnels spécialisés écoutent et établissent peu à peu la relation entre la souffrance individuelle du patient et les nouvelles formes d'organisation du travail.

PETITS MURMURES ET GRAND FRACAS

Avant d’opter pour un vers d’une des plus acerbes fables de Jean de La Fontaine, on connaissait Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés sous le titre de travail Le Petit Murmure et le bruit du monde. Au regard du documentaire sortant ce jour, on se prête à rêver que le petit murmure polémique et indispensable, qui bourdonne longtemps à nos oreilles en sortant de la salle, n’ira pas se noyer dans le grand bruit du monde. Mais bel et bien qu’il parviendra à y résonner, à y faire rouler l’écho orageux qui l’a vu naître. En bons sociologues de l’écran, Sophie Bruneau et Marc-Antoine Roudil nous livrent, bruts, les résultats d’une enquête de mise en scène documentaire, au service d’une mise en crise du dispositif social. Soient quatre situations d’entretien, quatre situations de souffrance au travail. Quatre scénarii, à la fois semblables et singuliers. Quatre nouvelles du monde moderne, tel que l’étiquetait un récent documentaire de calibre équivalent. De la Cité, en somme, au sens large du terme. Et quatre fois la parole. Ici une automate, autrefois mère de famille, dévoile la mécanique de sa souffrance, ses rouages mangés par les tics langagiers, la course éperdue des mots s’embouteillant à l’orée de ses lèvres. Là un cadre dynamité, se sent crever au petit feu d’un taylorisme aveugle… Ces mots qu’on n’entend pas - ou si peu, ou travestis sous la loupe déformante d’un harcèlement moral fourre-tout - bruissent enfin à plein. On n’entend même plus qu’eux. Mieux, on les écoute. Que tout cela se conclut sur un "Viatique" maladroit, sorte de bilan d’expert soudainement distanciateur, n’enlève rien à la puissance de ce qui précède. Encore moins à l’urgence de son propos.

par Guillaume Massart

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