L'Idéal
France, 2016
De Frederic Beigbeder
Scénario : Frederic Beigbeder, Nicolas Charlet, Thierry Gounaud, Bruno Lavaine, Yann Le Gal
Avec : Audrey Fleurot, Jonathan Lambert, Gaspard Proust
Photo : Gilles Porte
Durée : 1h30
Sortie : 15/06/2016
L'ancien concepteur-rédacteur Octave Parango de « 99 francs » s'est reconverti dans le "model scouting" à Moscou. Cet hédoniste cynique mène une vie très agréable dans les bras de jeunes mannequins russes et les jets privés de ses amis oligarques... jusqu'au jour où il est contacté par L'Idéal, la première entreprise de cosmétiques au monde, secouée par un gigantesque scandale médiatique. Notre antihéros aura sept jours pour trouver une nouvelle égérie en sillonnant les confins de la Russie post-communiste, sous les ordres de Valentine Winfeld, une directrice visuelle sèche et autoritaire. Entre les réunions de crise à Paris, les castings à Moscou, une élection de Miss en Sibérie, une fête chez un milliardaire poutinien et une quête des "new faces" aux quatre coins de l'ex-URSS, le fêtard paresseux et la workaholic frigide vont apprendre à se supporter et peut-être même à se sauver.
99 ROUBLES
Hasard du calendrier ou non, en seulement deux semaines sortent coup sur coup deux films traitant du monde de la mode : le carnassier The Neon Demon de Nicolas Winding Refn et ce L’Idéal de Frederic Beigbeder. Mais si le premier aborde ce milieu sur un ton que n’aurait pas reniés les Verhoeven de Showgirls et le Argento de Suspiria, ce dernier lui succède plutôt comme un écho inversé et surtout très loin du trip psychédélique orchestré par le réalisateur des Pusher, Drive et Only god forgives. Car on avait laissé Fréderic Beigbeder le réalisateur avec son Amour dure 3 ans, une première mise en scène brouillonne au goût de bancal et d’inachevé. Et le voir rempiler quatre ans plus tard avec cette nouvelle auto-adaptation et toujours accompagné par son alter-ego filmique Gaspard Proust pour cette fausse suite du 99 F de Jan Kounen avait de quoi inquiéter. Si la fougue visuelle du réalisateur de Dobermann et Blueberry avait savamment retranscris le contenu de l’œuvre écrite, qu’allait-il se passer lorsque l’écrivain récupérerait les manettes ? En se passant de Kounen et Dujardin, allions nous nous retrouver avec un produit grossier qui chercherait à raccrocher les wagons de son ainé ou Beigbeder allait-il trouver le talent nécessaire pour s’en affranchir ? A la vue du résultat, on peut affirmer que oui, le récompensé des prix Interallié et Renaudot a fait des progrès plus que notables dans l’exercice de la mise en scène et du rythme et que son script tiré d’Au secours pardon tient plutôt correctement la route pour qui est coutumier de l’auteur. Satire cruelle du monde de la beauté qui ne se prend jamais au sérieux, L’Idéal se montre plus ambitieux et presque moins nombriliste que le précédent essai de Beigbeder, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Mais là où le bas blesse, c’est dans son canevas un peu vain mais surtout dans l’interprétation de Proust qui ne fait que retranscrire à l’image (et pas toujours de la manière la plus habile) son personnage d’éternel cynique désabusé qui l’habille sur scène sans jamais chercher à proposer autre chose. Heureusement qu’Audrey Fleurot et surtout un parfait Jonathan Lambert rehaussent le niveau, ce qui permet à l’ensemble de passer outre la frivolité de son thème et de son exécution et se savourer comme le divertissement un peu bobo qu’il est, un produit format exercice de style narcissique qui n’accèdera certes pas à la postérité mais qui fait la blague comme on dit, parce qu’il le vaut bien…