I.D.
Charu et ses amies partagent un appartement dans l’une des tours de Mumbai. Toutes âgées d’une vingtaine d’années, elles sont venues des quatre coins du pays pour vivre dans la métropole. Un jour, un ouvrier se présente pour faire des travaux de peinture. Agacée de ne pas avoir été prévenue par ses colocataires, Charu presse le peintre d’en finir rapidement mais le retrouve quelques minutes plus tard allongé sur le sol, inconscient. Paniquée mais animée par la volonté de bien faire, elle part sillonner la ville de long en large à la recherche de la moindre information qui puisse la renseigner sur l’identité de cet homme….
L’IDENTITÉ NATIONALE
Suite à un accident, une jeune femme insouciante se retrouve confrontée à l’absurdité de l’administration de son pays, et c’est non seulement sa bonne volonté mais son individualité même qui se retrouvent mises à mal face à cette machine géante et arbitraire. Avec un tel pitch (qu’on pourrait croire sorti de n’importe quel film roumain de ces dernières années), le réalisateur promet deux pistes : à la fois l’urgence (l’héroïne dispose d’un temps limité pour retrouver la famille de son employé) et l’ouverture sociale (pour cela, elle doit littéralement sortir de chez elle et aller à la rencontre des autres). Or dans un premier temps, I.D. n’offre pas grand-chose pour dépasser le symbolisme de ces propositions. S’il est effectivement beaucoup question d’urgence (on court, on roule, on s’agite, on traverse la ville…), celle-ci a bien du mal à transparaître dans le rythme général qui reste bien mollasson. Difficile d’angoisser longtemps devant des scènes qui associent aussi souvent lenteur et redondance.
Ce qui manque ici c’est peut-être avant tout une présence forte dans la mise en scène. En ayant eux aussi toutes les apparences d’être pris sur le vif, les films de Brillante Mendoza sont toujours ultra-maitrisés et chorégraphiés, et donc remplis de tension, même quand le réalisateur philippin ne fait que suivre une grand-mère ou un enfant dans la rue. Les seuls effets de mise en scène sont ici des zooms/dé-zooms à répétition, une photo assez laide (sacrifiée au nom du réalisme ? Ce n’est pourtant pas incompatible). Faute d’une mise en scène suffisamment assurée pour créer le suspens nécessaire, et malgré quelques pistes intéressantes (la trace de main sur le mur comme une présence fantomatique), I.D. stagne dans une trop grande nonchalance qui n’a rien d’élégant. L’intérêt du film se situe ailleurs, dans sa manière de donner à voir un visage peu connu de l’Inde contemporaine, où les jeunes femmes fument et boivent. Le cinéma indien est encore perçu de manière très stéréotypée chez nous. Le naturalisme y est tellement peu attendu (à tort) qu’il en deviendrait presque une qualité, une preuve de modernité flamboyante, mais le réalisme social n’est pas une qualité strictement cinématographique. Ce n’est pas suffisant pour donner à I.D. l’ampleur qu’il mérite.