I Wish I Knew, histoires de Shanghai
Shang Hai Chuan Qi
Chine, République populaire de, 2010
De Jia Zhang Ke
Scénario : Jia Zhang Ke
Avec : Rebecca Pan
Photo : Nelson Yu Lik-wai
Musique : Lim Giong
Durée : 1h58
Sortie : 19/01/2011
Shanghai, fascinante mégalopole portuaire, a connu d’immenses bouleversements depuis 1930 : révolutions politiques et culturelles, assassinats, flux de population. Dix-huit personnes se remémorent leurs vies dans cette cité en perpétuelle évolution, leurs expériences personnelles, comme dix-huit chapitres d'un roman.
SHANGHAI SURPRISE
Le roman de Shanghai: voici ce que nous raconte Jia Zhang-Ke avec I Wish I Knew, portrait impressionniste d'une ville et d'un monde à travers dix-huit témoignages, dix-huit personnes qui rassemblent des souvenirs. De leurs aïeux, ou de leur passé liés à un Shanghai dont les mutations se sont faites dans la violence, litanie des morts énumérant les partisans politiques exécutés, les gangsters assassinés, ou, envolée romanesque, une comédienne broyée par l'existence. Dans les premiers instants du film, Jia Zhang-Ke expose l'un des motifs de son œuvre. Au premier plan, on observe une jeune femme qui marche dans un décor en ruines (ou en reconstruction?) tandis qu'au second plan se dressent de fiers buildings, deux mondes et deux époques en un même cadre. Comment se souvenir? Par une histoire, une photo, ou une chanson.
Alors qu'il filme des vieux couples dansant joue contre joue sur le standard rétro qui donne son nom au long métrage, Jia Zhang-Ke, en un fondu enchainé, fait un voyage dans le temps, filmant une rivière, des chantiers. Il s'agit en fait d'images de la rivière Suzhou, telle que Lou Ye l'a filmée dans son Suzhou River de 1999. Dix ans plus tard, Jia Zhang-Ke revient au même endroit, reprend le même chemin, et observe les transformations. Histoire(s) d'une ville et histoire(s) de cinéma. On convoque Hou Hsiao Hsien et ses Fleurs de Shanghai, Antonioni qui, dit-on, donne une piètre image des lieux, on se souvient de Printemps dans une petite ville de Fei Mu, alors mal accueilli, d'un film de propagande ou de Nos années sauvages de Wong Kar Wai dont l'actrice, Rebecca Pan, vient justement témoigner, raconter son Shanghai. A l'heure de l'exposition universelle organisée à Shanghai, un bout de mémoire est rassemblé, imprimé sur pellicule, celle de Jia Zhang-Ke comme celle d'autres cinéastes. Mémoire qu'on rejoue dans un décor de cinéma, où le mélange réel/fiction se montre bien plus convaincant que dans son précédent 24 City. Splendidement filmé, peut-être un rien longuet, I Wish I Knew, que le réalisateur porte en lui depuis une dizaine d'années, s'inscrit parmi ses réussites.