I Wish

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I Wish
Kiseki
Japon, 2010
De Hirokazu Kore-Eda
Scénario : Hirokazu Kore-Eda
Avec : Jô Odagiri
Durée : 2h06
Sortie : 11/04/2012
Note FilmDeCulte : ******
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Au Japon, sur l’île de Kyushu, deux frères sont séparés après le divorce de leurs parents. L’aîné, Koïchi, âgé de 12 ans, part vivre avec sa mère chez ses grands‐parents au sud de l’île, tout près de l’inquiétant volcan Sakurajima. Son petit frère, Ryunosuke, est resté avec son père, guitariste de rock, au nord de l’île. Koïchi souhaite par‐dessus tout que sa famille soit à nouveau réunie. Lorsqu’un nouveau TGV relie enfin les deux régions, Koïchi et son jeune frère organisent clandestinement un voyage avec quelques amis jusqu’au point de croisement des trains où, dit‐on, un miracle pourrait se produire…

LA VIE RÊVÉE DES ANGES

La mort a toujours été, depuis le début de sa carrière, au centre des films du Japonais Hirokazu Kore-Eda. Personnages confrontés à la mort (la veuve de Maborosi, les enfants dans Nobody Knows, le samouraï de Hana), lieux habités par la mort (les limbes d'After Life, le coin perdu où s'est déroulé un suicide collectif dans Distance, les tombes qu'on honore dans Still Walking), ou cette scène extraordinaire de Air Doll où l'héroïne, une poupée gonflable qui prend vie, se dégonfle peu à peu. I Wish tranche avec une œuvre jusqu'ici sombre (Hana excepté, film plus léger, dans tous les sens du terme), film de vie là où les précédents longs métrages étaient poèmes de mort. L'inquiétude guette dans I Wish mais elle est, curieusement, balayée d'un revers de main. Le film s'ouvre sur l'image d'un volcan réveillé, des cendres s'échappent de son cratère. L'un des jeunes héros s'étonne: "pourquoi les gens ne s'inquiètent-ils pas?". Un étrange écho, direct, aux événements de mars 2011 au Japon, dans un film tourné avant la catastrophe. I Wish est d'autant plus émouvant que ses bonheurs fragiles dansent sur un volcan. La seule vraie catastrophe, ici, a lieu lors d'une séquence de dessin animé: des jaillissements de lave à coups de Crayola.

Pourquoi, soudainement, un tel optimisme? Le cinéma japonais contemporain est beaucoup travaillé par la question de l'identité en mouvement, de la solitude (notamment urbaine), et d'une nouvelle façon de recréer une communauté. Distance, avec le suicide collectif d'une secte, ou Nobody Knows, avec sa nouvelle famille sans père ni mère, s'abiment dans la tragédie, signent l'échec d'une utopie. Still Walking filmait des retrouvailles familiales, sur un mode mineur, quotidien. Les retrouvailles de I Wish ont quelque chose d'héroïque car elles ne sont pas une simple visite à la grand-mère: deux frères sont séparés suite au divorce de leurs parents. Une ligne de train permet aux deux garçons de se revoir, un plan échafaudé dans le dos de leurs père et mère. A hauteur de gosses, tout prend des proportions différentes. Les après-midis n'en finissent pas, le champ de cosmos traversé par les enfants ressemble à un jardin d'éden. I Wish, sur plus de deux heures, déploie son hypersensibilité, sa bienveillance, l'optimisme semble simplement aller de soi puisque tout semble possible.

La caméra mobile de Kore-Eda, sa façon de coller aux petites baskets colorées, sa lumière d'heure magique: I Wish rappelle une version insouciante et apaisée de Nobody Knows. Pas un cruel abandon comme dans son film de 2003 mais, cette fois, une façon de faire avec ce qu'on a. On imagine ce qu'on voudra devenir plus tard, ou on formule un simple souhait. Kiseki, le titre original, signifie "miracle". I Wish n'est pas que candeur béate. Lors de son climax émotionnel, le film montre ses héros hurlant leurs souhaits, tous ensemble, dans le vacarme du passage d'un train, les crachant au vent à qui les entendrait, quelques rêves accrochés à un drapeau. Certains se réaliseront, d'autres non. En un bouleversant kaléidoscope, on refait le film, Kore-Eda attrape les espoirs de chacun. Le grand frère, devenu un tout petit peu adulte, se dit que les miracles n'existent peut-être pas. La caméra, habituellement si proche de ses personnages, reste, pudiquement, à distance lorsque l'un des garçons, le plus triste, vérifie si son souhait a été exaucé. Puis une dernière image: les enfants dévalent les marches du grand escalier de la gare. Still walking.

par Nicolas Bardot

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