Human Flow
Plus de 65 millions de personnes ont été contraintes de quitter leur pays pour fuir la famine, les bouleversements climatiques et la guerre : il s'agit du plus important flux migratoire depuis la Seconde Guerre mondiale. Réalisé par l’artiste de renommée internationale Ai Weiwei, HUMAN FLOW aborde l'ampleur catastrophique de la crise des migrants et ses terribles répercussions humanitaires.
NOUVELLES FRONTIÈRES
De l'artiste chinois Ai Weiwei, on connaît l’œuvre engagée et protéiforme: reportages et mises en scène photographiques, doigts d'honneur pop, ou encore installations sous forme d'étranges accumulations. On connaît aussi son destin d'exilé de longue date, persona non grata dans son propre pays désormais basé à Berlin. Un artiste symbole de rébellion, jouissant paradoxalement d'une popularité rare en occident. Après quelques documentaires tournés en Chine, Ai Weiwei s'est lancé avec Human Flow dans un projet de taille: un documentaire tourné dans 23 pays différents, à l'aide de 200 collaborateurs, un total de mille heures de rush. Un projet à l'image de son sujet titanesque: les 65 millions de personnes obligées de fuir leur pays et la guerre à travers le monde.
Human Flow brasse large: le film passe avec une grande soudaineté d'un continent à l'autre, de la Grèce à la Jordanie, du Rwanda à Calais, mettant côte à côte des situations politiques parfois très différentes, sans nécessairement s'attarder. Parfois fourre-tout, ce parti-pris est à mettre en parallèle avec certains autres choix de mise en scène qui peuvent laisser dubitatif sur le papier: des citations philosophiques qui apparaissent en surimpression ; des poèmes et des titres de grands journaux internationaux mis en parallèle ; une musique sentimentale qu'on aurait bien voulue voir abandonnée sur le banc de montage, etc. Des partis pris entre lesquels Ai Weiwei slalome pourtant jusqu'à bon port. Malgré ces choix un peu convenus, Human Flow parvient à montrer quelque chose qu'on avait rarement aussi bien vu: la très grande échelle de cet exode mondial.
Les très gros plans sur des visages anonymes et silencieux s’enchaînent dans un vertige avec des images tournées par drone, qui donnent un saisissant effet de réel à ces déplacements de masse. On ne voit pas si souvent des images aussi puissantes que ces plans filmés de si haut où ce que l'on croit d'abord être des fleurs ou des fourmis se révèle être des humains. De splendides et techniquement impressionnantes (on pense parfois aux documentaires de Yann Arthus-Bertrand), ces images deviennent poignantes, glaçantes. Ai Weiwei filme des populations hagardes, maltraitées et mal accueillies, dans un cadre d'une telle ampleur qu'il rappelle les mondes post-apocalyptiques du cinéma fantastique. Que toutes ces images soit réelles, voilà bien la claque que nous met le film.