Panorama: Hotel Dallas
Roumanie, 2015
De Sherng-Lee Huang, Livia Ungur
Avec : Patrick Duffy, Sherng-Lee Huang, Livia Ungur
Durée : 1h15
Dans les années 80, au crépuscule de la Roumanie communiste, Dallas est la seule série américaine autorisée à la télévision. Elle offre une vision de glamour et de richesse qui capture l'imagination de millions de spectateurs. Parmi eux, Ilie, un petit escroc et apprenti-capitaliste, et sa fille Livia, qui est folle de Bobby, interprété par Patrick Duffy. Après la chute du communisme, Ilie construit l'Hôtel Dallas, une reproduction fidèle du ranch de la famille Ewing. Livia part pour les Etats-Unis sur les traces de son fantasme...
DALLAS, TU TE RACCROCHES A TON PASSÉ
C'est l'un des projets les plus fous présentés cette année à la Berlinale. La Roumaine Livia Ungur et l'Américain Sherng-Lee Huang signent avec Hotel Dallas une docufiction qui jette un pont entre la Roumanie de Nicolae Ceaușescu et le soap-roi de l'Amérique de Ronald Reagan : Dallas. Ungur s'inspire de ses souvenirs et de l'époque où Dallas était l'un des rares programmes autorités à la télévision roumaine. Ce qui devait dégouter les Roumains du capitalisme a au contraire fasciné les foules. L'une des anecdotes les plus réjouissantes est celle de cette intervenante expliquant qu'elle entendait le générique en stéréo dans tous les appartements tandis qu'elle courait elle-même dans les escaliers pour voir l'épisode du jour.
Ungur et Huang partent de cette fascination exotique et dévient vers la pure fantaisie. Le film s'ouvre par une vraie visite du décor de la série, avant que l'on découvre... la réplique plus ou moins fidèle de ce décor, érigée par un doux-dingue en pleine cambrousse roumaine. Si les amoureux de la série riront à ces plans de portraits foirés du nabot Lucy ou du patriarche Jock, ou à cette publicité pour l'essence tournée par le Dieu Larry Hagman (doublé n'importe comment pour l'occasion), Hotel Dallas abandonne assez rapidement le fan-service.
L'alter-ego à l'écran de Livia Ungur souhaite partir aux Etats-Unis, à la recherche de son fantasme d'enfance. Patrick Duffy fait une apparition dans cet ovni auquel il prête essentiellement sa voix. Tous ces éléments sont, sur le papier, fascinants - mais les réalisateurs pèchent par excès. Personne n'exige un documentaire plat façon bonus dvd. Mais Hotel Dallas passe son temps à surjouer l'étrangeté et l'excentricité sans faire confiance à l'extravagance inhérente au sujet. Les digressions affaiblissent le film qui a des choses à dire non seulement sur le rêve américain, mais aussi sur sa transformation monstrueuse et sur l'impact géant de la pop culture sur les peuples. Mais tout cela est malheureusement dilué dans de nombreuses simagrées superflues (dont plusieurs chansons insupportables) qui donnent le sentiment que le vrai sujet du film n'est qu'effleuré au cours de ces courtes 70 minutes.