Hop
Belgique, 2002
De Dominique Standaert
Scénario : Dominique Standaert
Avec : Antje De Boeck, Jan Decleir, Ansou Diedhou, Alexandra Vandernoot
Durée : 1h44
Sortie : 29/10/2003
Justin, qui a tout d’un bon élève parfaitement intégré, doit, pour regarder les matchs de foot, trafiquer l’antenne de son voisin. Un soir, les voisins, un peu beaufs et fachos, débarquent, font les gros durs et balancent la télé sur la bagnole d’en bas. La police rapplique et Justin et son père, parce qu’ils sont en situation irrégulière, doivent s’enfuir. Dieudonné est arrêté et sous le coup d’une expulsion. Justin, qui a pu s’enfuir, est recueilli par Franz, un ex militant communiste bourru et taciturne. Avec son aide, il met en place une série de stratagèmes pour libérer son père.
UNE FABLE DECOMPLEXEE
Flirtant délibérément avec la fable, le film de Dominique Standaert affiche ouvertement ses bonnes intentions: les bons gagnent toujours contre les méchants et les enfants viennent à bout des adultes grâce à leur faculté de rêver et d’y croire. En noir et blanc, et en haute définition, le film sur-symbolise son propos et s’écarte délibérément d’une représentation trop réaliste qui le ferait pencher vers le documentaire. Il s’évade vers la comédie et joue ouvertement avec quelques lieux communs: le footballeur noir intégré (l’enfant, lui, reste sur le bord du terrain), le gentil coco ex-terroriste repenti mais qui ne supporte toujours pas les représentants du pouvoir, les figures du racisme déclinées des gros beaufs au politicien arrogant de paternalisme, en passant par les fonctionnaires effrayants de petitesse baveuse et revancharde. Mais le scénario utilise chacun de ces éléments comme un moteur du récit. Tout fait donc sens au sein même de l’histoire. Ce qui aurait pu devenir éreintant de déjà-vu ou de bons sentiments devient ici jubilatoire par la grâce d’un scénario rocambolesque, de l’humour du film et des comédiens, Jan Decleir, Antje De Boeck et Ansou Diedhou, tragique et digne. Si tout cela fonctionne, c’est parce que l’on est clairement au cinéma.
LE POUVOIR DES MOTS
Comme toutes les fables, le film se développe à partir d’un "Il était une fois...", qu’il endosse et assume dès les premières images, avec le récit de Justin ou "comment les pygmées ont-ils permis l’émergence de la civilisation romaine grâce au HOP..." (on vous laisse le suspens). Son professeur l’écoute médusé. Mais Justin se moque, conscient de ce que l’on attend de lui. De la même manière, la miraculeuse guérison d’Emile M’Penza joue sur la même crédulité. A travers les yeux de Justin et de Dieudonné, c’est cette bêtise et cette violence qui nous sont données à voir: ne tolérer de l’autre que ce qui répond à nos attentes, l’enfermer dans un imaginaire pour réduire son étrangeté et maîtriser sa différence, c’est le racisme. Et c’est grâce au pouvoir des mots que Justin va parvenir à renverser le rapport de force. Menace, mensonge, chantage, l’histoire se construit sur une suite de paroles proférées. Par la parole et son pouvoir, le scénario avance et le conflit se résout. Tout l’enjeu dramatique du film repose sur elle. Etre digne de foi, être entendu, conter des histoires pour changer le réel, c’est ce à quoi s’emploie Justin pour faire revenir son père. Autour de ce mystérieux "HOP", la parole est le véritable enjeu du film puisqu’il s’agit de la prendre et de se faire entendre. HOP est un film modeste qui rêve avec son personnage au pouvoir des histoires.