Honor de cavalleria
Espagne, 2006
De Albert Serra
Scénario : Albert Serra
Avec : Jaume Badia, Glynn Bruce, Felicià Butinyà, Lluís Carbó, Lluís Cardenal, Lluís Serrat
Durée : 1h47
Sortie : 14/03/2007
Guidés par le hasard, Don Quichotte et Sancho poursuivent jour et nuit leur voyage à la recherche d’aventures. Ils chevauchent à travers champs, bivouaquent à la belle étoile, conversent, guettent un ennemi invisible.
ENFANTILLAGES
Malédiction du virus critique: il faudrait prolonger ce constat dressé, à la fin de l'année passée, que le devenir nature envahissait le cadre. Honor de cavalleria ne peut en effet pas y couper: végétal, luxuriant, mutique, corps perdus dans les branchages, immergés dans l'eau, noyés dans la sublime obscurité céleste du crépuscule. L'ombre de Straub et Huillet plane, on tend l'oreille; les mythes rôdent en ce cinéma primitif. Ces rencontres avec eux bis? Pas vraiment: c'est qu'ici, Sancho et Quichotte résistent à la minéralisation, ne se fondent pas dans le décor. Organique errance: peiner à marcher, se laver, manger, tresser des couronnes de laurier et dormir à la belle étoile. Ici, la nature ramène aux corps, leur poids, leur masse, leur usure. Corps marginaux, veillant l'un sur l'autre, dépendants l'un de l'autre: voyez la scène introductrice, ce rituel enfantin du sommeil retardé; voyez la baignade, ce rituel enfantin du t'inquiète pas, viens, elle est bonne; voyez l'engueulade, ce rituel enfantin du je te cause plus, donnons-nous la main; voyez la chevalerie et son honneur, ce rituel enfantin du combat en armure, évacué à coups de montage… Du Straub récréatif, en somme, dans le meilleur sens du terme: léger, décousu, bucolique, reposant. Parfois trop. C'est aussi là son charme.