Homme de Londres (L')
Hongrie, 2007
Avec : Tilda Swinton
Durée : 2h25
Sortie : 24/09/2008
FESTIVAL DE CANNES 2007 -Une nuit, Maloin, aiguilleur d'une gare portuaire est témoin d'un crime... Au lieu de quitter le quai après le passage en douane, un homme se cache dans le noir, comme pour attendre quelqu'un. Par dessus la proue du bateau apparaît un autre homme qui jette une valise en direction du premier. Une dispute éclate entre eux. Un des hommes tombe à l'eau avec la valise, l'autre s'enfuit. Maloin descend de son poste de contrôle. Il ne peut sauver la victime mais récupère la valise et y découvre une forte somme d'argent.
Mieux vaut Tarr que jamais
Pour de nombreux cinéastes contemporains dont Gus van Sant, il est le grand maître du plan-séquence et de la mise en scène. Malgré la beauté ensorcelante de Damnation et des Harmonies Weckmeister, le réalisateur hongrois Béla Tarr n'a pas encore franchi les frontières de la cinéphilie pour toucher le grand public. Gageons que ce dernier soit intéressé par cette nouvelle adaptation du roman de Georges Simenon, après celle de Henri Decoin en 1943. Reparti bredouille du Festival de Cannes 2007 après avoir reçu un accueil partagé, L'Homme de Londres sort enfin sur nos écrans, le même jour que la Palme d'Or 2008 Entre les murs... Si le film de Laurent Cantet recevra, sans nulle doute, un triomphe public et critique mérité, il serait dommage de passer à côté d'une véritable expérience esthétique, une oeuvre forte et originale qui impose son rythme étouffant et implacable aux spectateurs intrépides.
M le maudit
Dès le somptueux plan-séquence inaugural, qui fixe une demi-heure durant la scène du crime, le maître magyar nous place sous hypnose. Noyé par un noir et blanc somptueux, le port de Bastia est une ville-fantôme seulement troublée par quelques hommes hagards dont Maloin, simple aiguilleur d'une gare portuaire, oiseau de nuit un peu trop curieux... Et Béla Tarr de jouer avec le cinéma, étirant les séquences à l'infini en ne quittant que rarement les pas d'un anti-héros guère sympathique. Cinéaste des éléments et de l'implacabilité des destins, il respecte à la lettre l'esprit de Georges Simenon. On retrouve ainsi l'atmosphère poisseuse des premiers Maigret et ces personnages à la morale douteuse, prêts à tout pour l'appât du gain et l'espoir d'une vie nouvelle. Moins aérienne que dans Les Harmonies Weckmeister, la mise en scène de Béla Tarr fait oublier la rigidité de l'interprétation et l'absence cruelle d'émotion provoquée par une narration trop linéaire. L'Homme de Londres reste néanmoins un film important, le dernier acte en date d'un créateur unique qui maîtrise à la perfection l'art cinématographique.