Hell

Hell
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Hell
France, 2005
De Bruno Chiche
Scénario : Bruno Chiche, Lolita Pille
Avec : Nicolas Duvauchelle, Sara Forestier, Christiane Millet, Anne-Marie Philipe, Didier Sandre, Michel Vuillermoz
Durée : 1h40
Sortie : 01/03/2006
Note FilmDeCulte : *-----

Hell, une jeune fille issue d'un milieu aisé, passe ses nuits dans les boîtes parisiennes et ne fréquente que la jet-set. Mais dans ce monde où tout n'est que paillettes, elle est en proie à un certain mal de vivre. C'est alors qu'elle fait la rencontre d'Andrea, un jeune homme avec qui elle s'isolera pendant six mois, pour entamer une descente aux enfers.

NIHILISME FASHION

L'enfer, prétend-on, est pavé de bonnes intentions. Celles de Hell, au sortir de la projection, peuvent échapper: qu'a donc voulu montrer Bruno Chiche? La déliquescence d'un agrégat générationnel - dont, ceci dit, l'identification ne relevait pas de l'urgence - réunissant dans un grand élan alcoolisé pouffiasses couche-toi-là et fils à papa flambeurs? Une forme prétendument cinégénique de nihilisme fashion? Une heure quarante plus tard, on n'en sait rien et, pire, peu nous en chaut. Vaguement référencé à une glorieuse lignée de grands films d'autodestruction, Hell n'a en effet de cesse d'en trahir les leçons. Ce que Chiche aimerait hériter des goinfres de Ferreri, des addicts d'Aronofsky, des yuppies amochés de Fincher, est ici nul et non avenu. Chacun, pourtant, est convoqué. La Grande Bouffe: un concours de gobage cul-sec d'alcools forts - et c'est oublier que les bouffeurs, dans leur maison au fond du parc, ne se pochetronnaient pas, mais se régalaient, préférant assumer frontalement, avec toute leur tête, l'haleine lourde de la Faucheuse. Requiem for a Dream: coke et coke et colegram, plans baise pas clairs - et c'est oublier que ce n'était pas comme pour s'en foutre. Fight club: un petit tour de vélo dans l'appartement vide et un brossage de dents pédagogique - et c'est oublier que Brad Pitt se rétamait en bicyclette, ou qu'Edward Norton s'arrachait une dent.

TÔT OU TARD, LES FRUITS BLETTISSENT ET PUENT

De l'autolyse, Hell ne conserve donc que le concept trompeusement romantique, l'énergie adolescente, ici même puérile, du geste suicidaire, reléguant tout le reste - avortement, gueules de bois, partouzes, crash - en un hors-champ hypocrite. Il en oublie ainsi l'acception scientifique, physiologique, voulant que, tôt ou tard, les fruits blettissent et puent. C'est pourri de l'intérieur et la merde au cul que l'on meurt chez Ferreri; c'est nécrosé, amputé et meurtri que l'on finit chez Aronofsky; c'est troué, sanglant et demi-mort que l'on termine chez Fincher. Hell vomit propre, baise propre, sniffe propre… Et lorsqu'enfin l'on se salit un peu, que l'on sort d'une nuit au poste la souillure à même la peau, c'est pour immédiatement se laver la bouche au savon maternel. Maman gronde son garçon, envoyez les violons, moralisez, moralisez, il en restera toujours quelque chose, allez… Alors oui, il y a bien ce quelque chose, dans Hell: des fulgurances de vérité sous la couche de Paris Première, quelques instantanés, en HD pauvre, de la faune noctambule parisienne, la confirmation d'un acteur (Nicolas Duvauchelle, crédible et charismatique, une fois de plus, après Une aventure) et l'infirmation d'une autre (Sara Forestier, désapée, malmenée, jet-settisée, mais décidément esclave de son rôle tchatcheur de L'Esquive). Mais d'intentions ("rich will be rich?"), en somme, point. Rien n'est provoqué, rien n'est gêné: un doigt d'honneur à l'affiche, plouf, et la surface de l'eau redevient étale.

par Guillaume Massart

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