Helen
Royaume-Uni, 2009
De Joe Lawlor, Christine Molloy
Scénario : Joe Lawlor, Christine Molloy
Avec : Dennis Jobling, Sandie Malia, Annie Townsend
Photo : Ole Bratt Birkeland
Durée : 1h19
Sortie : 07/04/2010
Joy, une fille de 18 ans, est portée disparue. Une autre jeune fille, Helen, est sur le point de quitter son foyer d'accueil. Elle est alors sollicitée par la police pour incarner Joy dans une reconstitution qui retracera ses derniers faits et gestes. Helen se prend au jeu et s'immisce dans la vie de la disparue à mesure qu'elle côtoie ses proches et les lieux fréquentés jadis par Joy.
A CORPS PERDU
Lors d'une scène pas innocente d'Helen, on assiste aux répétitions du spectacle de l'école, où sera joué Brigadoon, comédie musicale se déroulant dans un village écossais dont les habitants sont endormis depuis 100 ans. Helen, l'héroïne éponyme du film des Britanniques Christine Molloy et Joe Lawlor, n'en a que 18 mais semble à peine sortie du coma qui engourdit ses membres depuis des années. Helen suit l'étrange transfert, la rencontre des fantômes, d'une fille qui n'est plus (Joy, disparue au bord d'un bois, le temps d'une ellipse), à celle qui la réincarne (Helen, jeune apprentie commédienne qui s'apprête à quitter son foyer d'accueil, et qui est Joy le temps d'une reconstitution policière). Molloy et Lawlor, avec leur sobriété cadenassée, leur dispositif formel en boucle, pourraient se prendre les pieds dans leur propre piège à loups. Mais Helen évite tout chausse-trappe et livre le portrait puissant d'une jeune fille devenue indifférente à tout, jusqu'à ce que l'horizon d'une renaissance pointe au loin - même s'il ne s'agit que d'un rôle.
Helen capture ainsi l'apathie désabusée d'une gamine sans rien, projetée dans la peau d'une autre - une famille, un petit ami, un imper jaune. Pourtant, lorsqu'Helen enfile ce dernier, elle ne disparaît que davantage, aspirée par le décor automnal des bois. L'existence privée de sens et de but, atone et éteinte, Helen bouillonne pourtant, aux portes d'une autre vie. Molloy et Lawlor, à coups de lents travellings de serpent, dessinent avec délicatesse cette douleur rentrée bouche cousue, cette projection comme une renaissance certes, mais aussi une barrière, et font quelques merveilles avec leur direction d'acteurs, notamment avec l'héroïne, délivrant le moins d'intention pour le maximum d'effet. Et d'émotions, car sous la glace, on sent son embrasement qui sans cesse grandit.