Guerrière

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Guerrière
Kriegerin
Allemagne, 2012
De David Wnendt
Scénario : David Wnendt
Avec : Alina Levshin
Photo : Jonas Schmager
Musique : Johannes Repka
Durée : 1h43
Sortie : 27/03/2013
Note FilmDeCulte : ------
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Marisa, vingt ans, fait partie d’un gang de néo-nazis. Tatouée de swastikas, le crâne rasé, elle déteste les étrangers, les juifs, les noirs et les flics. Ils sont pour elle la raison du déclin de l’Allemagne, et de son existence médiocre dans une petite ville moribonde. Haine, violence et fêtes noyées dans la bière rythment son quotidien, jusqu’à l’arrivée en ville de deux jeunes réfugiés afghans, et l’irruption dans son gang d’une adolescente de quatorze ans à peine, Svenja. Ces trois nouveaux venus mettent à mal le fanatisme de Marisa…

LES NÉO-NAZIS POUR LES NULS

« Un film courageux et nécessaire », « un-formidable-portrait-de-femme » : on entend déjà à l’avance les louanges qui accompagneront Guerrière lors de sa sortie française. Guerrière est un film pour tous ceux qui confondent histoire et scénario. Peu importe si le scénario est conçu en dépit du bon sens, son histoire-choc (une plongée dans le quotidien de jeunes néo-nazis allemands) prime avant tout. Ses personnages sont écrits avec une épaisseur psychologique digne des pires blockbusters hollywoodiens. Mais Guerrière n’est pas un blockbuster hollywoodien, c’est un film allemand sur les néo-nazis. Ce n’est donc pas un navet, mais un film courageux-et-nécessaire.

Dès le début, Guerrière fait grimacer. Le premier long de David Wnendt (qui a 35 ans, et a, on l’espère, écrit le scénario quand il en avait 16) fait partie de ces films qui pensent qu’une succession de scènes sensationnelles créent le drame. On suit donc des néo-nazis qui mettent le dawa, ils agressent des gens paisibles, le public finit par s’indigner, c’est naturel. C’est filmé n’importe comment, avec du gros son, c’est le chaos. Le problème, c’est que derrière, il n’y a rien, aucune réflexion. Wnendt n’a, sur un thème aussi délicat, même pas l’humilité de poser des questions. Il apporte des réponses : tout ça, c’est la faute aux familles dysfonctionnelles. Chaque personnage a droit à sa scène pour montrer ce qui ne va pas (un père mourant, un grand-père abusif, une fille-mère, etc), avec l’index du réalisateur qui apparaît dans le cadre pour bien nous pointer le problème. Guerrière, sur un sujet terrorisant, est un film rassurant : il nous montre sans cesse ce qu’on doit comprendre, ce qu’on doit ressentir. Toutes ces scènes sont d’une lourdeur pachydermique (mais quelque part, elles marchent : le public réagit fortement quand une jeune fille traite son beau-père d’« enculé », beaucoup plus que lorsque des gamins afghans se font renverser en moto par l’héroïne néo-nazie).

Lors de la présentation du film au Festival du Cinéma Allemand, on nous indique que David Wnendt devait, à l’origine, réaliser un documentaire. Que son travail d’enquête lui a servi pour faire cette fiction. Le résultat n’en est que plus consternant. Comment oser filmer une scène comme celle où l’héroïne néo-nazie, décrite jusqu'ici comme un bloc de haine, se lie avec un ado étranger (l’un des Afghans qu’elle a tenté de tuer – elle culpabilise) ? Cette scène où le garçon lui montre, sur une carte, où se trouve son pays ? Où il lui présente, sur son téléphone, une vidéo de chez lui ? Une poule marche dans l’herbe. L’héroïne sourit – en fait, elle avait un cœur. Comment prétendre faire un film réaliste sur un tel sujet avec des scènes aussi bêtes et malhonnêtes ? Il ne reste que des marionnettes agitées dans un scénario exécrable (la jeune ado, transformée d’un coup en figurante consentante en fin de film; les nazis, caractérisés comme une version trash des Gaulois d’Astérix - ils boivent, se mettent sur la gueule). Le dénouement de la relation entre l’héroïne et l’Afghan contient autant de glucose mélodramatique qu’un épisode de sitcom familiale de M6. Un peu juste, peut-être, pour un film sur un sujet aussi sensible ?

par Nicolas Bardot

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