Fynbos
Afrique du Sud, 2012
De Harry Patramanis
Scénario : Harry Patramanis
Durée : 1h36
Dans une ville d’Afrique du sud, Meryl, une femme mariée, jette ses papiers d’identite dans une poubelle. Son mari Richard, agent immobilier, cherche à tout prix un acheteur pour une maison de rêve. La villa Fynbos, transparente et en verre, se fond dans les collines avec une beauté presque trop grande pour l’œil humain. A mi-chemin entre la terre et les cieux...
LA MAISON DES SECRETS
On est tenté de présenter Flynbos en disant qu’il sort de nulle part. Pas tant parce qu’il s’agit d’un premier long-métrage mais parce qu’il fait partie de ces films qui ne ressemblent à rien tant qu’à eux-mêmes, une qualité aussi rare qu’enthousiasmante. Si Fynbos peut évoquer certaines références (en vrac, Pique-nique à Hanging Rock, Le Désert des Tartares ou encore L’Avventura…), il existe par lui-même, imposant brillamment sa singularité sans modèle écrasant. De quoi ça parle ? Eh bien ce curieux film fait partie de ceux pour lesquels cette question n’a pas d’importance. Certes, il s’en passe des choses dans cette maison, et même des choses pas banales, mais le plus précieux atout du film est avant tout son mystère. Un mystère qui nait de ce qui n’est pas dit, ce qui n’est pas expliqué. Or s’il est avare en explications simplistes, Harry Patramanis est surtout généreux en mystère. Tant mieux.
Le film s’ouvre sur une femme qui se débarrasse de son identité comme d’une vilaine bête ou d’une maladie honteuse, en jetant à la poubelle ses papiers d’identité et le contenu de son sac. Aucune explication à son geste, et dès cette première scène, l’inconnu va de pair avec une certaine brutalité. Un peu plus tard, cette même femme disparait corps et âme pour de bon. Mais avant et après cela, la tension sera montée comme la température autour d’elle et des autres personnages, tous égarés et isolés dans une maison en verre posée en haut d’une montagne. Invraisemblablement isolée, à la fois glacée et vide, la maison en question devient peu à peu le catalyseur de toutes les angoisses des personnages, un trouble indicible et omniprésent, une paranoïa presque existentialiste face à un hors-champ à la violence fantasmée.
Sauvagerie de la nature, agressivité sociale de la ville la plus proche, violence conjugale, soupçon fantastique, basculement d’identités, symboles ésotériques et fin de civilisation… tout cela trouve sa place, sa justification et surtout son équilibre dans un récit pas facilement résumable et à l’ambiance unique. Cela grâce à l’incroyable sens du hors-champ dont fait preuve Patramanis. Fynbos impose peu de choses et suggère énormément, avançant avec un équilibre permanent entre l’ultra réalisme et le fantastique. En redonnant toute sa place à l’imaginaire du spectateur, il parvient plus efficacement que bien d’autres à ouvrir une porte vers une autre dimension.