Frères d'exil
Brudermord
Allemagne, 2005
De Yilmaz Arslan
Scénario : Yilmaz Arslan
Avec : Bulent Buyukasik, Erdal Celik, Nurettin Celik, Taies Farzan, Xewat Gectan, Xhiljona Ndoja
Durée : 1h36
Sortie : 12/04/2006
Le jeune Kurde Azad quitte ses parents pour rejoindre son grand frère en Europe. Arrivé en Allemagne, il intègre un foyer d'accueil, où il fait la connaissance d'Ibo, un orphelin de neuf ans, lui aussi d'origine kurde. Une profonde amitié naît entre les deux garçons. Mais une mauvaise rencontre avec deux frères d'origine turque dégénère en crime et ravive les tensions entre communautés...
LIBERTÉ, FRATERNITÉ, ÉVISCERÉ
La moindre des qualités de Frères d'exil est d'illustrer un vrai sujet, concret, solidement ancré en une réalité européenne. Soit, donc, le dossier brûlant et soigneusement documenté de l'immigration, et son corollaire raciste, appliqué au contexte germanique. D'évidence, le triangle conflictuel Turcs-Kurdes-Allemands fait le corps du film, qui n'est jamais aussi juste que tant qu'il s'en tient au détail documentaire: arrivée des parfois très jeunes exilés en pays étranger, prosélytisme xénophobe, tensions intercommunautaires, petits boulots à la sauvette… Tout ceci tisse la toile de fond d'un film qui, en d'autres mains, eut pu s'élever avec grâce à dimension humaine. Yilmaz Arslan, c'est là que tout se gâte, a d'autres ambitions: brandissant comme un fardeau l'héritage spirituel de Pasolini, il aspire à la grande Tragédie, d'inspiration classique, avec crimes en mode majeur, embrouillaminis familiaux et passions exacerbés. Dès lors Frères d'exil trébuche, là où Luna rossa parvenait à prendre son envol, se laissant aller à un misérabilisme appuyé, grotesque (un plan mémorablement absurde, à base de boyaux et de chien affamé, fait basculer le film), gratuitement jusqu'au-boutiste et nauséeux (viol, oreille tranchée, clebs anthropophage…). Cette complaisance détestable, qu'Arslan suppose au service du mythe, ne remplissant, au final, qu'une fonction repoussoir. Celle-ci suffit hélas à annihiler les efforts de sincérité qui animaient la première partie du film. Et à gâcher un beau sujet.
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Frères d'exil a obtenu le Léopard d'Argent, ainsi qu'une mention spéciale du jury pour Xevat Gectan, au Festival de Locarno 2005.