Femmes en miroir

Femmes en miroir
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Femmes en miroir
Kagami no onnatachi
Japon, 2003
De Kiju Yoshida
Scénario : Kiju Yoshida
Avec : Sae Issiki, Hideo Murata, Tokuma Nishioka, Mariko Okada, Yoshiko Tanaka
Durée : 2h09
Sortie : 02/04/2003
Note FilmDeCulte : ***---

Ai Kawase retrouve sa fille disparue. Celle-ci a changé de nom et n’a aucun souvenir de sa famille. Ai avertit sa petite-fille Natsuki du retour de sa mère. Ensemble, les trois femmes se rendent à Hiroshima dans l’espoir de reconstruire leur passé.

LA VOIX DES MORTS

Après Shohei Imamura (Pluie noire), Akira Kurosawa (Rhapsodie en août) et Nobuhiro Suwa (H Story), Kiju Yoshida évoque à son tour l’indicible expérience de Hiroshima. Femmes en miroir analyse le traumatisme trans-générationnel d’un peuple ayant connu l’horreur de la bombe atomique. Disparu de la scène depuis Onimaru en 1988, le réalisateur japonais portait ce sujet depuis de longues années. Trois femmes partent en quête d’un souvenir et tentent d’expliquer la disparition de l’une d’entre elles (la mère), au large de la ville martyre. Miroirs brisés à jamais, elles incarnent une société japonaise choquée par cet acte inhumain qui dépasse toute explication psychologique. Les survivants ayant vécu comme une honte leur douleur passée, le Japon n’a jamais fait son deuil, préférant cacher puis enfouir ce sinistre épisode de l’Histoire. La plaie reste ouverte, toute guérison impossible. On ne saura jamais si Masako est bien la fille de Ai, impressionnante figure maternelle. Ai feint-elle une affection démesurée pour celle qui pourrait être son enfant? Eprouve-t-elle réellement cet amour?

HIROSHIMA, MON AMOUR

Ancienne figure de proue de la Nouvelle Vague japonaise des années 60, réalisateur de films engagés politiquement et esthétiquement, Kiju Yoshida est un formaliste exigeant qui soigne particulièrement les cadres et la photographie. Admirateur du cinéma de Yasujiro Ozu, il a rédigé un essai très estimé sur l’œuvre du maître japonais, développant notamment le concept de l’anti-cinéma: la volonté de ne pas imposer la puissance de l’image et de privilégier le texte à celle-ci. Ainsi, dans Femmes en miroir, la dilatation du temps en de longs plans-séquences hypnotiques place la parole au centre du récit et fait primer la réflexion sur le spectaculaire. Par respect pour les victimes, le drame n’est montré qu’au travers d’édifiantes photographies d’archives. Kiju Yoshida souligne hélas son propos par des plans d’un symbolisme pesant et abuse des figures symétriques qui finissent par étouffer les protagonistes. L’utilisation d’une bande-son stridente accentue cette désagréable impression. Malgré le perfectionnisme de la réalisation et l’interprétation troublante de Mariko Okada, épouse du cinéaste à la ville, Femmes en miroir souffre d’un évident trop-plein.

par Yannick Vély

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