Festival de Locarno: Entertainment

Festival de Locarno: Entertainment
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Entertainment
États-Unis, 2015
De Rick Alverson
Durée : 1h44
Note FilmDeCulte : ****--
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En tournée dans le désert californien, un comique vieillissant échoue dans une série de salles de troisième rang et tente en vain de joindre sa fille dont il est séparé. Le jour, il arpente le paysage aride, en s’aliénant par mégarde tous les amis. Le soir, il cherche réconfort dans l’entrain de son personnage scénique. Stimulé par la promesse d’un lucratif contrat à Hollywood et la possibilité de recréer une relation avec sa fille, il se traîne parmi des rencontres de plus en plus surréalistes et dangereuses.

HERE WE ARE NOW, ENTERTAIN US

On l'entend souvent, on l'a déjà dit ici : la cinéma indépendant américain n'a parfois d'indépendant que le nom, et les sundanceries encensées ailleurs comme des révélations (ces films-Wikipédia à la Fruitvale Station par exemple) n'ont pas plus de personnalité que des grosses productions calibrées - elle ont juste moins de budget. Le but semble parfois surtout de présenter une carte de visite avant d'avoir, ô joie, le droit d'être appelé par Hollywood pour tourner la suite d'un reboot. Heureusement, il y a dans Entertainment un esprit frondeur qu'on peut réellement nommer indépendant. D'abord présenté à Sundance, Entertainment a ensuite été sélectionné à SXSW avant de poursuivre son marathon à l'ambitieux Festival de Locarno - de quoi éveiller la curiosité.

Quatrième long métrage (depuis 2010) de Rick Alverson, Entertainment raconte l'histoire du plus sinistre des humoristes, en tournée dans les plus glauques des bars de patelins hantés. Le lettrage très délicat et élégant du générique est évidemment une fausse piste. Dès le début, l'entertainment en question prend la forme d'une clownerie horrible, Alverson saisissant l'absurdité de ce boulot d'attention whore qu'est humoriste, où l'on tente de faire rire le public comme on retournerait une boite à meuh. La caméra fixe et imperturbable d'Alverson capture la bizarrerie quotidienne du décor, ce no man's land menaçant duquel émerge une mer de gigantesques pompes à pétrole.

Le héros monte péniblement sur scène et ânonne ses blagues qui rappellent les plus belles heures des Roucasseries. Mais à quel point joue t-il ses plus horribles blagues ? Alverson exploite habilement cette hésitation autour d'un clown tristissime qui semble échappé de chez Todd Solondz. Le malaise est majuscule, le rire est angoissant, la violence larvée ne demande qu'à gicler. Entertainment n'est pas qu'un freak show et parvient à faire l'ambigu portrait d'un profond mal-être jusqu'au vertige. Le film glisse peu à peu vers le surréel, quitte à le surjouer. Il flirte avec le surplace, mais évite avec bonheur les trajectoires didactiques des antihéros du ciné indé US qui finissent toujours par suivre leur programme de normalisation. Entertainment est plus brut, plus déglingué, moins lisse, moins obsédé par l'idée de plaire à tout prix. Ce sont autant de qualités.

par Nicolas Bardot

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