D'où l'on vient
In The Heights
États-Unis, 2021
De Jon Chu
Durée : 2h23
Sortie : 23/06/2021
Au cœur de New York, le quartier de Washington Heights est celui de tous les possibles. Usnavi, propriétaire d’une épicerie dans le quartier, rêve de renouer avec ses origines, en République Dominicaine. Mais tout se complique quand il croise le regard de Vanessa, une jeune femme qui rêve de devenir styliste. Leur rencontre, sur fond de danse et de musique, va chambouler leur vie de manière inattendue.
IT MUST BE NICE TO HAVE WASHINGTON HEIGHTS ON YOUR SIDE
Quand se termine la première chanson, qui présente un par un les différents personnages de cette comédie musicale chorale en mélangeant déjà les mélodies, et que le titre apparaît enfin, tonitruant, comme pour les Disney de la grande époque, on est pris d’une envie d'applaudir. D’où l’on vient est ce genre de film. Le genre de film qui semble avoir déjà son storytelling tout tracé au vu du contexte actuel : quel meilleur candidat pour fédérer les spectateurs dans les salles fraîchement rouvertes que ce spectacle à la liesse contagieuse? On sent déjà les mauvaises ondes des réfractaires au genre, les mauvaises langues prêtes à baver sur le CV du réalisateur, ainsi que les potentielles craintes que certains pourraient avoir face à ce qui semble justement être des bons sentiments en préfabriqués comme peuvent en témoigner le synopsis, l'affiche ou le titre français. Si le film n'était adapté du premier musical de Lin-Manuel Miranda (Vaiana, Hamilton), la méfiance pourrait être de mise. Mais justement, c'est Miranda. Quant à Jon Chu, il est pour le coup davantage dans son registre de prédilection que sur ses excursions hors de sa zone de confort (G.I. Joe : Conspiration, Insaisissables 2). Ensemble, ils signent un film solaire, où tous les clichés et le sentimentalisme sont justifiés par la sincérité de l'expérience.
Pendant lumineux du phénomène Hamilton, qui était une réinterprétation pop et dramatique de l'Histoire américaine en un Amadeus-like hip-hop, D'où l'on vient demeure une célébration de la culture hispanique et, une fois de plus, de l'immigration. Si le livret n'a évidemment pas la même portée ici que pour le chef-d’œuvre lauréat du Prix Pulitzer susmentionné, la question est bien là. Qu’est-ce qu’un foyer ? Où se sent-on chez soi ? Accueilli ? Le passé et les envies de chacun des protagonistes reflètent ses interrogations et la réponse résonne comme une revendication, contre l’embourgeoisement notamment. D'où l'on vient est le portrait d'un quartier, avec ses personnages mais surtout ses personnalités, des archétypes mais tous relativement attachants, et ses arènes, autant de commerces de service où œuvrent les minorités, du salon de manucure à l'épicerie. La peinture de ce type de microcosme est généralement l'apanage du cinéma indépendant new-yorkais, avec des histoires de gangsters à deux doigts du stéréotype racial, absentes ici, et voir la comédie musicale se l'approprier avec panache apporte un vent de fraîcheur en plus de rendre plus expressionniste l'amour et l'authenticité avec lesquels ce petit monde est croqué. Avec son mariage entre hip hop et salsa, son découpage qui profite au mieux du langage cinématographique et ses chorégraphies parfois audacieuses comme lors de l’émouvant segment « Paciencia y fe » où des passagers du métro deviennent les spectres de travailleurs des îles, D'où l'on vient dégage une énergie communicative au point de donner parfois des frissons. Parfait pour l’été.