Disparues (Les)

Disparues (Les)
Envoyer à un ami Imprimer la page Accéder au forum Notez ce film
Disparues (Les)
The Missing
États-Unis, 2003
De Ron Howard
Scénario : Ken Kaufman
Avec : Cate Blanchett, Jenna Boyd, Aaron Eckhart, Tommy Lee Jones, Eric Schweig, Jay Tavare, Evan Rachel Wood
Durée : 2h17
Sortie : 17/03/2004
Note FilmDeCulte : ****--

En 1886, dans le Nouveau Mexique. Maggie Gilkeson, une guérisseuse, vit seule avec ses deux filles, alors que son père, avec lequel elle s’est brouillée, fait irruption par surprise dans le cocon familial. La jeune femme le rejette sans ménagement, mais va devoir s’attacher à ses services après un drame inattendu.

LA BIBLE ET LE FUSIL

Par cycles réguliers, le western renaît de ses cendres encore chaudes. Veine particulièrement irriguée ces dernières années, le voyage mystique devient un enjeu très prisé pour redécouvrir les plaines d’antan. Du western fantôme de Dead Man au trip chamanique de Blueberry, le dialogue s’établit sur les terres de la spiritualité. L’échange est cristallisé en un titre: alors qu’hier John Ford peignait les aventures de ses Searchers (titre original de La Prisonnière du désert), Ron Howard se penche aujourd’hui sur The Missing, ses disparues. Le film se fait charivari des croyances, communion de toutes les dévotions, celles qu’on psalmodie auprès d’un corps en souffrance et qui renversent les barrières identitaires. Ces terres de western, explorées de toutes parts depuis des années, recèlent encore des bribes de mystère et d’inconnu. Les Disparues se fait le film de leur travestissement, masque d’un décor que l’on croit connaître par cœur. Un homme blanc transformé en Apache ou des jeunes filles maquillées maladroitement en aguicheuses de bas étage. Une mère, muée en chasseuse, fusil à l’épaule, ou un Indien, au costume imposant de maître ès magie noire, capturant les identités de ses victimes à travers quelques clichés vieillis. Sans avoir la prétention de renouveler le genre, Les Disparues souffle simplement sur quelques poussières pour y installer son récit, le conte des retrouvailles. Et si la traduction française préfère éliminer toute ambiguïté sur l’identité des «disparues», l’appellation originale préserve son doute sibyllin.

LES EGARES

Cette absence, s’agit-il de celle d’une fille enlevée, objet de la recherche désespérée? Ou est-ce un père qui, disparu des années durant, surgit de nulle part tel un fantôme du passé? Est-ce la mère décédée de Maggie, le géniteur fugitif de ses enfants ou son amoureux platonique, elle qui semble perdue dans la désolation d’un paysage où les coyotes s’invitent à la table familiale? Les reflets de l’absence sont multiples. Les personnages dépareillés courent après cette dernière pièce, celle qui manque, et sont plongés dans un danger permanent, où les serpents sont accrochés aux arbres, où les sifflements de ces derniers hurlent leur fureur, et où le bruit des balles rappelle le tranchant des armes blanches. Dans le désert aride, les héros sont renvoyés à leur dénuement, entre attraction viscérale du vide et instinct familial de fer. Ron Howard s’était déjà pris les pieds dans le tapis d’un sujet voisin avec La Rançon, il peut cette fois compter sur un scénario à l’histoire puissante et aux figures subtiles (portées par des acteurs admirables). L’héroïne n’est pas que blanche colombe, elle est aussi une femme nourrie par la haine ou la méfiance de l’étranger. Le père n’est pas là que par soucis de rédemption, et avoue sa part intéressée. De même, les Indiens s’éloignent singulièrement de la fraîche imagerie idyllique pour en nuancer les couleurs. Chaque figure a son reflet, excepté un méchant d’anthologie, incarnation sauvage et grand-guignolesque du Mal. Dommage que la mise en scène, plutôt illustrative et sans grand relief, ne vienne pas donner le dernier coup de collier à un film qui mériterait écrin plus raffiné. Les Disparues constitue néanmoins l’un des tous meilleurs films de son inégal réalisateur.

par Nicolas Bardot

En savoir plus

Quelques liens :

Partenaires