Cannes 2014: Deux jours, une nuit

Cannes 2014: Deux jours, une nuit
Envoyer à un ami Imprimer la page Accéder au forum Notez ce film
Deux jours, une nuit
Belgique, 2014
De Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne
Scénario : Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne
Avec : Marion Cotillard
Sortie : 21/05/2014
Note FilmDeCulte : ****--
  • Cannes 2014: Deux jours, une nuit
  • Cannes 2014: Deux jours, une nuit
  • Cannes 2014: Deux jours, une nuit
  • Cannes 2014: Deux jours, une nuit

Sandra, aidée par son mari, n’a qu’un week-end pour aller voir ses collègues et les convaincre de renoncer à leur prime pour qu’elle puisse garder son travail.

48 HEURES

Deux Palmes d'or, un Grand Prix, un prix du scénario le tout en 12 ans et quatre films (un long métrage = un prix), le palmarès des frères Dardenne à Cannes a de quoi faire pâlir d'envie le Theo Angelopoulos avide d'honneurs qui sommeille en certains cinéastes. De quoi crisper aussi, car la formule Dardenne n'a pas tant évolué pour justifier une telle avalanche répétée de prix, jusqu'à l'un de leurs films les plus faibles, le lisse et programmatique Le Gamin au vélo. Ce serait injuste d'avoir une dent contre Deux jours, une nuit pour cette bête raison, d'autant que le film, s'il ne parvient pas vraiment à surprendre, vaut le coup d'oeil.

Avec l'arrivée de Cécile de France dans le cinéma des Dardenne s'est opérée une rupture. Ce qui aurait pu être un renouvellement s'est finalement révélé être un défaut: l'effet de réel des précédents films des cinéastes était amoindri par la présence d'une star rendant un peu artificiels les enjeux du long métrage. Non pas qu'une star ne puisse pas incarner une caissière ou une chômeuse, mais les visages inconnus de Emilie Dequenne ou Arta Dobroshi se fondaient plus facilement dans la façon qu'ont les frères de capter brute toute la tension réaliste d'un décor social. La caméra court après l'héroïne, ce que vous voyez est en train d'arriver. Le cast de Cotillard nous a fait douter, mais, au-delà du fait que l'actrice livre une de ses meilleures performances, celle-ci est l'un des intérêts plus ou moins involontaires du long métrage. Voir Cotillard jouer ce personnage dont la survie dépend de son modeste emploi, dans un film où tout tourne autour de la question de l'argent (de la prime qui aide à survivre et de la paye qui manque), a quelque chose d'à la fois toc, moralement un peu gênant, et presque conceptuel: Cotillard la star comme moyen de transcender ses personnages in situ incarnés par des acteurs dits amateurs.

Deux jours une nuit est tout simplement meilleur que Le Gamin au vélo car sa mécanique est moins émoussée, plus efficace. Deux jours une nuit part sur un ultimatum: Sandra a deux jours pour convaincre ses collègues de renoncer à leur prime pour sauver son emploi. Une urgence qui donne une dynamique au long métrage, dont la structure répétitive (Sandra rendant visite à chacun de ses collègues, avec des réactions différentes et, si ce n'est un but, au moins un apprentissage au bout du chemin) est celle des contes traditionnels. Voir une star dans ce contexte, entre jeu sur le réalisme et hyper-réalisme (cette violence sociale où un employé peut être ejecté après un vote digne de la Star Academy) n'est plus vraiment un problème. Sa vision sans grande nuance des patrons (méchant loup débordant de mauvaise foi ou pleutre cynique) est, elle, un peu plus ennuyeuse. Malgré la légère impression de déjà vu dont on peine à se défaire, le récit reste puissant et son héroïne assez bouleversante.

Le Palmomètre: Un jury présidé par un Sean Penn aurait sans doute accordé sa troisième Palme aux Dardenne. Un jury présidé par Jane Campion ? Pas sûr. Si les frères sont des candidats crédibles, Marion Cotillard pourrait rafler la mise si le film de sa principale "rivale", Anne Dorval, remporte la Palme d'or (laissant le prix d'interprétation vacant, à moins d'un double prix Palme + interprétation pour le Dolan).

par Nicolas Bardot

Commentaires

Partenaires