Dark Touch
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France, 2013
De Marina De Van
Scénario : Marina De Van
Durée : 1h30
Sortie : 19/03/2014
Un soir, en pleine campagne, dans une maison isolée, les objets et meubles se déchaînent contre ses habitants et les tuent tous. Seule rescapée : une petite fille de 11 ans dont la police se borne à ignorer le témoignage...
HELL IS FOR CHILDREN
Dark Touch est aussi proche qu’éloigné de Ne te retourne pas, précédent long métrage de Marina de Van. Dans les deux films, le drame psychologique s’exprime par le cinéma de genre. A chaque fois, le point de départ est grotesque (dans son sens littéral, monstrueux) : une femme se transforme en une autre dans Ne te retourne pas, des meubles s’attaquent aux êtres humains dans Dark Touch. Pourtant, le traitement est totalement différent. Comme elle nous l’avait confié dans notre entretien, Marina de Van embrasse plus concrètement le fantastique avec Dark Touch, film où « où le surnaturel n’est pas désavoué ». A la lumière jaune et or de Ne te retourne pas succède un bleu glacial dans Dark Touch. Et là où il y avait quelque chose de très spectaculaire (et totalement fascinant) dans les mutations monstrueuses du précédent film de la réalisatrice, Dark Touch paraît presque austère – pour être clair, les attaques de meubles ne ressemblent pas à ce qu’on pourrait voir dans une prod Sushi Typhoon.
Les premiers plans du générique s’attardent sur des meubles. Évidemment immobiles. Et s’ils bougeaient ? Le cinéma de Marina de Van raconte, de Dans ma peau à Dark Touch, comment ce qui est parfaitement familier (un corps, un visage, une commode) peut devenir inquiétant jusqu’à faire perdre la raison. A l'image de Ne te retourne pas, De Van cadre d’abord beaucoup ses personnages sans tête. La tête sur laquelle on se concentre, c’est celle de sa jeune héroïne. Comme pour celles de Dans ma peau et Ne te retourne pas, il y a une fêlure en elle. Marina de Van y plonge comme on plonge dans un cauchemar. Son film est glauque, triste et prend le genre au sérieux. Il semble hors du temps, avec son curieux tempo, son étrange lumière, son casting sorti de nulle part (avec des adultes peu charismatiques qui se ressemblent tous). L’impression de découvrir une vieille bobine de la Caverne des introuvables.
Dark Touch est surtout réjouissant par son absence totale de morale, comme l’illustre le dénouement en enfer, où la cruauté du réalisme bascule dans la cruauté du conte. Le film est plus subversif que bien des films d’horreur gore. Par la métaphore, le déplacement, la réalisatrice peint au plus près l’horreur de la maltraitance, peut-être plus précisément encore que ne l’aurait fait un drame psychologique classique. Dark Touch donne l’impression d’être un film fait en toute confiance (sans racolage, sans effets gratuits) alors même qu’il est très singulier ; et c’est déjà ce qui rendait les précédents films de Marina de Van uniques. Un plan, le meilleur de tout le film (et qu’on ne dévoilera pas), l’exprime parfaitement. En un travelling arrière, la caméra suit l’héroïne qui marche et laisse le chaos derrière elle. C’est presque un détail lointain dans l’image mais il faut toujours, chez la réalisatrice, se pencher plus attentivement sur les choses (sur ce qu'il y a sous la peau, sur les traits d'un visage, sur le secret d'une gamine maltraitée) pour les voir vraiment.
