La Dame de fer
Iron Lady (The)
Royaume-Uni, 2011
De Phyllida Lloyd
Scénario : Abi Morgan
Avec : Jim Broadbent, Meryl Streep
Photo : Elliot Davis
Musique : Clint Mansell
Durée : 1h44
Sortie : 15/02/2012
L'histoire relate les dix-sept jours précédant la Guerre des Malouines, entre mars et juin 1982, qui donnèrent au Premier ministre britannique Margaret Thatcher le surnom de Dame de fer.
LADY NASTY
Après le triomphe commercial de Mamma Mia!, la réalisatrice britannique Phyllida Lloyd remet ça avec Meryl Streep, dans un registre plus sérieux cette fois: le biopic de figure historique. Plus précisément, un portrait impressionniste de Margaret Thatcher, pas vraiment une dancing queen donc. Comment allait s'opérer la transition entre le plaisir coupable de Mamma Mia!, film qui ne se distinguait pas particulièrement par une mise en scène remarquable (plutôt une remarquable laideur, qui accentuait la culpabilité du plaisir), et cette Dame de fer? En un mot: mal. Sans espérer un nouveau The Queen, La Dame de fer parvient à faire de The Lady un sommet de complexité (Thatcher n'est au fond qu'une gentille solitaire progressiste qui a voulu changer les choses). Premier problème: Lloyd dit avoir voulu faire un film apolitique. Pourquoi pas. Mais pourquoi alors passer 75% de film à suivre les actions politiques de Thatcher, ses combats électoraux, pour les traiter aussi superficiellement? La Dame de fer réussit à "parler" de politique sans jamais en dire un mot, voir la guerre des Malouines réduite à une partie de Risk. La volonté de faire un film apolitique se heurte rapidement à ses limites, d'autant que les petits segments familiaux sont vraiment ratés.
Mais le principal problème de La Dame de fer est sa mise en scène. Et là, le constat est assez renversant: on aura assez rarement vu, ces dernières années, mise en scène plus sotte au cinéma. Les contre-plongées sur des visages clownesques (pathétique Jim Broadbent) ou les plans en vue subjective avec de lourdes portes qui s'ouvrent sur des regards sévères de vieux messieurs, ou des ricanements de jeunes filles (d'un kitsch digne des pires clips de Mylène Farmer) tartinent le film d'un mauvais goût assez rédhibitoire (ou jubilatoire, c'est selon). Phyllida Lloyd ne semble avoir aucune alternative à ses images d'archives longuement répétées et, dès qu'arrive un discours, ses lents travellings avant accompagnés d'une musique d'un pompiérisme suggérant que Bruce Willis va débarquer pour sauver la planète. Mais ce n'est pas lui qui sauve cette Dame en détresse. Ce n'est pas non plus cette gestion chaotique de la caméra à l'épaule ni ce montage steak tartare. Meryl Streep est à peu près la seule à sortir indemne ce de déraillement.
Qu'elle valse avec les dirigeants du monde façon It's a Small World, qu'elle déambule en flottant dans les couloirs du Parlement (plan terrible et extraordinaire), Streep parvient à rester digne et grande. Toujours au bord du too much, mais toujours du bon côté. Bigger than life mais pas Zébulon grotesque. Comme c'est le cas avec quelques immenses acteurs, lorsque Streep est à l'écran, on regarde ce qui se passe. Sa présence est un élément dramatique en soi. Et il s'opère alors un drôle de match de catch entre sa précision à elle, et l'absence totale de rigueur du reste du long métrage, qui peut, lui, être très appréciable à un second degré camp. Lorsque Thatcher, à la fin du film, enguirlande avec autorité ses très piètres collaborateurs, on a l'impression que c'est Streep qui engueule l'équipe responsable de La Dame de fer. Miss Maggie ne s'attendait probablement pas à être l'héroïne malgré elle d'un épisode non-officiel de French & Saunders.