Comme tout le monde

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Grand vainqueur d'un jeu télévisé, Jalil voit bientôt arriver dans sa vie la ravissante Claire. Il ignore que cette jeune femme est en fait une comédienne, complice d'un institut de sondage...

TOUT LE MONDE IL EST GENTIL

Voilà qui tombe à pic pour confirmer deux récentes impressions critiques, quant à la dilution dans le consensus de la comédie française versus l'ardeur belge, évoquée en contre-exemple de Dikkenek, et les contraintes cathodiques pesant sur les téléfilms de cinéma, théorisées à l'occasion de Lili et le baobab. 1. De l'humour méchant et de sa belgitude: la coproduction internationale ne trompe personne et ce qui eut pu constituer une farce virulente côté plat-pays, tombe seulement à plat. Armé d'un high concept à potentiel satirique certain (un homme politique exploite un Loft story officieux pour y tester sa campagne à venir), Comme tout le monde n'assume pas l'acidité jubilatoire de son projet comique. Il y avait pourtant matière à: vitrioler le pouvoir médiatique, brocarder la vacuité d'un débat politique mené par les sondages et le spectacle, immoler le sacro-saint échantillon représentatif sur l'autel de la médiocrité… De ces options narratives ne subsistent que des traces, roboratives certes, mais insuffisantes: un directeur marketing d'une suavité gluante, génialement incarné par un Gilbert Melki hilarant, et quelques épigrammes furtifs, piques bienvenues et pas mal vues à l'adresse du marketing (dans sa production massive d'inutilités) et de la télé-réalité (destruction méthodique et systématique des caméras cachées)… Mais la guimauve guette, tartinée allègrement dans un dernier acte censément jouissif, en fait pleinement inoffensif.

JE PASSE À LA TÉLÉ

D'où, chapitre 2. De la téléfilmicité et de ses travers: à consulter la longue liste des coproducteurs, l'on saisit vite l'incompatibilité génétique du sujet explosif et de sa concrétisation. Il n'est pas anodin que Comme tout le monde ne se risque jamais à situer son pays d'appartenance: nous voici dans un espace-temps incertain, sans doute français — proximité avec les présidentielles royalo-sarkozystes oblige — où les hommes politiques avancent sans couleur et s'affichent sans complexe en girouettes populistes. Pourquoi pas: la fable serait ainsi universelle. Pour preuve, le protagoniste principal est issu de l'immigration et vit un parfait conte de fée libéralo-républicain. La chose se gâte quand le nivellement vire à l'aplanissement. On a traité de l'aseptisation des thèmes. Celle-ci ne va hélas pas sans un arasement esthétique afférent, calibré pour le petit écran. Les cadrages en témoignent, qui débitent les personnages en hommes et femmes-troncs. Le reste est à l'avenant: rendu sage, paré pour un prime-time (90 minutes tout pile, ça tombe bien) vaguement sulfureux, en réalité très convenablement "visible" (au sens godardien qu'on cita chez Chantal Richard). Et tellement loin des modèles revendiqués, The Truman Show en tête de liste… On le regrette d'autant plus que Thomas est amoureux, le justement remarqué premier long de Pierre-Paul Renders, annonçait une audace à venir, qui ne fait ici que dériver sur une surface tristement étale.

par Guillaume Massart

En savoir plus

Comme tout le monde donne le coup d'envoi d'une salve de films autour de la présidentielle, dont l'intrigant Président de Lionel Delplanque en septembre, qu'on espère plus courageux que le film de Renders, puis, l'an prochain, le déjà très redouté Candidat de Fabien (H)Onteniente, avec Bernard Tapie dans le rôle titre. On comprendra, dès lors, que le filon puisse apparaître autant audacieux (il n'est pas dans la tradition française de s'emparer de sujets d'actualité brûlants) qu'opportuniste.

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