Come As You Are
Miseducation of Cameron Post (The)
États-Unis, 2018
De Desiree Akhavan
Durée : 1h31
Sortie : 18/07/2018
Pennsylvanie, 1993. Bienvenue à God’s Promise, établissement isolé au cœur des Rocheuses. Cameron, vient d’y poser ses valises. La voilà, comme ses camarades, livrée à Mme. Marsh qui s’est donnée pour mission de remettre ces âmes perdues dans le droit chemin. La faute de Cameron ? S’être laissée griser par ses sentiments naissants pour une autre fille, son amie Coley. Parmi les pensionnaires, il y a Mark l’introverti ou Jane la grande gueule. Tous partagent cette même fêlure, ce désir ardent de pouvoir aimer qui ils veulent. Si personne ne veut les accepter tels qu’ils sont, il leur faut agir...
DÉLIVREZ-NOUS DU MAL
Le titre original de Come As You Are, The Miseducation of Cameron Post, laisse une porte entrouverte vers l’ambiguïté. La mauvaise éducation de ladite Cameron, héroïne du long métrage, est-ce celle qui aurait fait d'elle une lesbienne, ou est-ce plutôt celle pavée de bonnes intentions qu'on lui enseigne dans un camp intégriste de thérapie homophobe ? La réponse n'est pas très difficile à trouver dans l'édifiant long métrage réalisé par l'Américaine Desiree Akhavan, révélée par Appropriate Behavior et lauréate du Grand Prix à Sundance avec ce nouveau film.
« Ce qui vous semble fun est en fait le véritable ennemi », enseigne t-on vite à des jeunes gens que les adultes largués ne semblent ici vouloir (ou pouvoir) contrôler que par la peur. Ces jeunes valent-ils seulement la peine d'être sauvés – la question cinglante est posée à haute voix. Car Come As You Are raconte avec une certaine force la bienveillance hypocrite de religieux persuadés de devoir aider (et soigner) des jeunes gens libres qui n'ont nulle besoin d'aide, et surtout pas de ce type de soin. C'est l'une des réussite du long métrage de Desiree Akhavan : montrer comment la violence psychologique s'exerce dans un cadre qui n'apparaît pas immédiatement violent en apparence, mais dont les conséquences sur de jeunes individus parfois fragiles peuvent s'avérer terribles.
Il y a pourtant une certaine douceur dans le traitement d'Akhavan, une place même laissée à une part de comédie. C'est parfois incontournable lorsqu'on décrit un quotidien où des ados des années 90 doivent abandonner les Breeders pour écouter une kitschissime folk religieuse, ou lorsqu'on s'exerce sur des fouilles psychologiques sommaires à base d'improbable iceberg. Mais derrière les anecdotes, derrière les paroles de Céline Dion chantées au karaoké et où il est question de cœur ne sachant plus où et pour qui battre, Come As You Are raconte comment l'intégrisme religieux déguisé en bonne parole n'enseigne par le lavage de cerveau rien d'autre que la haine de soi. Et si la manière, très indé-Sundance, manque de personnalité, Come As You Are demeure une réussite solide, portée notamment parmi les seconds rôles par la charismatique Sasha Lane, la révélation de American Honey.