City of Life and Death
Nanjing ! Nanjing !
Chine, République populaire de, 2009
De Lu Chuan
Scénario : Lu Chuan
Avec : Ye Liu
Photo : Cao Yu
Musique : Liu Tong
Durée : 2h12
Sortie : 21/07/2010
Evocation du massacre de Nankin, épisode de la guerre sino-japonaise au cours duquel, en 1937, durant plusieurs semaines, des dizaines de milliers de civils et soldats chinois furent tués par l'armée japonaise, dans la ville occupée de Nankin.
LIFE DURING WARTIME
La vie et le mort dans une seule ville. Fresque historique inspirée de l’histoire récente chinoise (la prise de Nankin, ayant déjà donné lieu à de nombreuses fictions et documentaires), City of Life and Death affiche son ambition dès son nom (le titre original, lui, hurle le nom de la ville martyre), et à l’image de ce titre international, le film est divisé en deux parties. Le début du film, presque dépourvu de dialogues et de personnages, nous montre la prise de la ville en se concentrant sur la peur panique, vécue a hauteur d’homme, au milieu des statues qu’on renverse et des fillettes qu’on sacrifie, dans cette ville exsangue, décor fantomatique de scènes de batailles massives aux impressionnantes chorégraphies. City of Life and Death saisit immédiatement par sa mise en scène d'un monde chaotique où seule existe la foule, celle des soldats ou des anonymes, face à une violence filmée ici sans complaisance ni fausse pudeur. On retrouve cette violence dans une deuxième partie, très différente, où Nanking devient le havre bouillonnant d'une cohabitation forcée entre opprimés et envahisseurs, une période qui pourrait aussi bien durer une semaine qu’une décennie, succession de gros plans et scènes d'intérieur, où les personnages acquièrent enfin des noms, la parole, une vie. L’espoir anéanti pour les assiégés finit par revenir comme des rayons de soleil trop précoces, inattendus, comme par exemple dans la relation ambigüe naissant entre un soldat et la prostituée qu’il a violée.
Cette alternance perpétuelle entre éclats de violence et lueurs d’espoirs débouche peu à peu l’horizon de cette ville-prison, et fait évoluer le film vers un coté plus émouvant, où l'écriture brillante parvient à éviter miraculeusement tous les clichés qui guettaient au coin de la porte cette grande fresque historique (manichéisme, mélodrame pachydermique, sur-héroïsation des personnages, etc...). Mais le film est avant tout une grande réussite au-delà de tout ce qu'il évite : c'est grâce à la sincérité rare et la subtilité de son regard sur ce passé commun qu'il se montre largement à la hauteur de sa grande ambition. On n’attendait pas forcément autant du réalisateur de Kekexili, mais City of Life and Death est tout simplement l’un des meilleurs films de guerre de ces dernières années.