Capturing the Friedmans

Capturing the Friedmans
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Capturing the Friedmans
États-Unis, 2003
De Andrew Jarecki
Scénario : Ahn Sang-Hoon
Avec : Arnold Friedman, David Friedman, Elaine Friedman, Jesse Friedman, Seth Friedman
Durée : 1h47
Sortie : 07/04/2004
Note FilmDeCulte : ****--

Un jour, le destin d'une famille juive américaine sans histoire bascule dans le chaos. Le père et le plus jeune fils sont accusés de pédophilie. Un documentaire revient sur ces événements qui tranchent dans la normalité.

CAPTURE THE LIGHT

Capturing the Friedmans. Capturer les Friedman. De cette simple assertion découle une subtilité inattendue. Un prétexte pour délivrer une profondeur qui va au-delà du sordide original de l'affaire. Le but du réalisateur Andrew Jarecki n'est plus uniquement de reconstituer la chronologie d'un fait divers, mais bien de percer une part du mystère de l'Homo sapiens occidental. Capturer les contradictions de sa société, dévoiler les petits arrangements avec l’authenticité, mettre à jour la notion de point de vue, celle qui enfouit la Vérité sous des tombereaux de mensonges et d'incertitudes. Mais il fait plus encore: il reconstitue devant nos yeux une évidence. Un être humain n'est pas nécessairement celui que l'on croit. Le doux père, l'enseignant pédagogue, le membre dévoué de la communauté ne peut pas se résumer qu'à cette addition de superlatifs. Et il apparaît parfois que la personne la plus proche cache ses secrets honteux, sa double vie inavouable. Ce n'est rien de moins que cette ambition qui est affichée modestement mais sûrement par Capturing the Friedmans. C'est à travers l'histoire d'un père et d'un fils sur la sellette que la mesquinerie éclate sans fard. Tout commence par la découverte d'un colis postal égaré. Envoyé de Hollande et destiné au père, il contient plusieurs revues pédophiles. De ce crime avéré découlera quelques jours plus tard une nouvelle accusation, plus grave encore et plus floue. Celle d'actes de pédophilie perpétrés par le père et le cadet de la famille lors de leçons d'informatique.

CAPTATION

Muni de l'impressionnante collection de vidéos familiales de l'époque, Jarecki va reconstituer la déliquescence d'une famille. Ne cessant d'enregistrer leur quotidien, ces petits films sont autant d'incursions dans l'intimité de personnes ordinaires, incapables de réellement gérer la nouvelle situation de deux de leurs membres. Il met le doigt sur la fragilité de l'équilibre familial ainsi que sa place au sein d'une communauté bien pensante où la rumeur est plus lentement mortelle que bien des poisons. Jugés avant leur procès, les Friedman font montre d'une telle arrogance que cela en deviendrait presque suspect. Cependant à l'intérieur de l'unité, les rancoeurs naissent. A l'aide de témoignages récents, les griefs amers des enfants se tournent vers une personne: la mère. Exit le père effacé, dépassé par les événements, sans personnalité, celle qui a anéanti le patriarche n'est rien de moins que cette femme qui semble être la dernière à croire que sa famille peut être sauvée. Amertume, animosité, l'aîné mène le bal pour liguer ses deux frères contre elle. Si le réalisateur met volontairement de côté l'issue du procès Friedman jusqu'à la fin, Capturing the Friedmans n'est pas moins un film jouant sur le doute du bien-fondé des accusations. Aucune réponse ne sera apportée, préférant le malaise de l’incertitude à la facilité de la dénonciation. Brut, sec, émouvant et révoltant, Capturing the Friedman soulève un voile sur l'impitoyable noirceur commune d'individus lambdas.

par Nicolas Plaire

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