Boy A
Royaume-Uni, 2009
De John Crowley
Scénario : Mark O'Rowe
Avec : Andrew Garfield, Katie Lyons, Peter Mullan
Photo : Rob Hardy
Musique : Paddy Cunneen
Durée : 1h40
Sortie : 25/02/2009
A 24 ans, Jack sort de prison où il a passé toute son adolescence. Dès sa libération, Terry, assistant social, lui donne un autre nom, lui trouve un travail, une maison. Dans cette ville d'Angleterre qu'il ne connaît pas, Jack se construit une nouvelle vie à laquelle il tente de se tenir. Mais si l'anonymat est un répit, il est aussi une douloureuse contrainte puisque Jack ne peut révéler à ses nouveaux collègues ou amis, et à la fille dont il tombe amoureux, la vraie nature de son passé. Jusqu'au jour où, par hasard, Jack devient un héros local et que sa photo apparaît à la une des quotidiens...
LE MASQUE DU DEMON
Dans un tribunal, la caméra s'attarde sur des pieds qui ne touchent pas le sol, gamin pressentant le verdict dans un fauteuil dont l'accoudoir semble avoir été usé par l'attente anxieuse de précédents couperets. John Crowley distille ses flashbacks non pas pour jouer sur le suspens crapoteux, plutôt sur l'empathie du spectateur envers un jeune homme attachant mais qui possède pourtant, dit-on, le visage d'un démon. Boy A suit une quête de rédemption, dont le motif rappelle un fait divers qui a secoué le Royaume-Uni il y a une quinzaine d'années, passé horrible dilué dans l'anonymat, mais même avec un autre nom, dans une autre ville, les fantômes subsistent, dans les rêves comme à la porte. Au centre, un personnage fort, Jack, grand garçon de 24 ans mais qui, sortant de prison, ne sait rien de la vraie vie, chaussant ses Nike Escape comme un symbole. Crowley pianote sa partition du social anglais à son meilleur, qu'il s'agisse de l'efficacité de la mise en scène, le soin apporté à l'écriture, et l'interprétation impeccable avec notamment le jeune Andrew Garfield qui, malgré ses tics, fait figure de petite révélation en version fluette de Colin Farrell, avec cette fragilité que le comédien irlandais a pu exposer dans ses derniers films. Boy A ne traite ni d'ange ni de diable, offrant un constat entre ombres et lumières, où une vie peut être jetée à l'eau comme une anguille écorchée ou sauvée par hasard au bord d'une route. Collectionneur de prix (en témoigne sa razzia au dernier Festival du Film Britannique de Dinard), Boy A, malgré quelques rares faiblesses (tout ce qui entoure le fiston délaissé, en deus ex machina un cheveu expédié), est porté par une forte tension dramatique et un regard nuancé sur sa tragédie ordinaire.