Bord de mer

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Bord de mer
France, 2002
De Julie Lopes-Curval
Scénario : Julie Lopes-Curval
Avec : Hélène Fillières, Ludmila Mikael, Bulle Ogier, Jonathan Zaccaï
Durée : 1h28
Sortie : 04/12/2002

Note FilmDeCulte :

Une petite ville au bord de la mer, dans laquelle les habitants partagent leur temps entre la saison du tourisme et des plages, et le reste de l’année, travaillant dans une usine de galets. Ouvrière, Marie veut quitter cet endroit paisible dans lequel les rêves ne se réalisent plus.

EN ATTENDANT LE BONHEUR

A l’origine de Bord de mer, il y a une vraie idée de cinéma qui consiste à matérialiser dans une mise en scène très douce une sorte de "fuite immobile". Celle de personnages à ce point ancrés dans un endroit précis, qu’ils ne peuvent s’évader et laisser libre court à leurs folies, à leurs rêves de jeunesse, malgré ce paysage ouvert que constitue l’océan. Ceux qui restent tentent de partir en faisant autre chose, ceux qui s’ont partis reviennent régulièrement, mais à reculons. Le paysage décrit dans le film bénéficie, par la grâce d’une réalisation extrêmement mature, d’une véritable personnification, que doivent subir les personnages qui y vivent. Il y règne une réelle tristesse, palpable, persistante, représentée magnifiquement par le regard triste, la démarche lourde d’Hélène Fillières qui confirme ici qu’elle est sans doute la jeune actrice française la plus intéressante du moment. Affichant son spleen dans les rues de la ville saison après saison, elle est ici, et ailleurs… Avec les autres personnages, et effroyablement seule. Malgré ce garçon, maître nageur l’été et caissier l’hiver, qui l’aime maladroitement mais sincèrement, sans vraiment comprendre ce qu’elle recherche. Malgré cette vieille dame qui l’amuse, dépensant sa retraite au casino pour tromper l’ennui et la vieillesse. Malgré ce couple établi, affectueux et plus compréhensif, dont le mari passe le temps devant son aquarium. Marie, le personnage joué par Hélène Fillières, attend quelque chose. Un rêve, un souvenir de petite fille, qui se forme progressivement, sensiblement, au fil des saisons, en la personne de ce prince charmant, lui même étranger à sa mère, à son couple, à la ville qui l’a pourtant vue naître.

Bord de mer est un drôle de film choral, dans lequel une galerie de personnages réussit à émouvoir, dans lequel le rythme imprimé par la réalisatrice reste sublimement lent. Certains sont malheureux, tandis que d’autres se contentent bien de ce malheur, cachant leur tristesse par une attitude aigrie. Toutefois, le film de film de Julie Lopes-Curval a ceci de beau qu’il refuse absolument de juger ses personnages. L’on se prend soudainement à les aimer, à les trouver touchants, tous autant qu’ils sont. Tout simplement parce qu’elle se contente humblement de montrer plutôt que de démontrer, de constater plutôt que de pointer du doigt. Cette succession de portraits est donc ce qu’il y a de plus réussi dans ce film, justifiant à elle seule la Caméra d’or remportée au dernier festival du film de Cannes. Filmés avec douceur par une jeune réalisatrice sûre d’elle, ils évoluent dans un monde clos, musical (sublime bande originale), parfois proche de l’irréel (la scène du requin), ce qui renforce encore son caractère effrayant. Une petite réussite, qui persiste bien au delà de la projection.