Blonde

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Blonde
États-Unis, 2022
De Andrew Dominik
Scénario : Andrew Dominik
Avec : Ana De Armas
Musique : Nick Cave, Warren Ellis
Durée : 2h47
Sortie : 28/09/2022
Note FilmDeCulte : *****-
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Adapté du best-seller de Joyce Carol Oates, BLONDE est une relecture audacieuse de la trajectoire de Marilyn Monroe, l’une des icônes hollywoodiennes les plus atemporelles. De son enfance tumultueuse à son ascension fulgurante et à ses histoires d’amour complexes – de Norma Jeane à Marilyn –, BLONDE brouille la frontière entre réalité et fiction pour explorer l’écart de plus en plus important entre sa personnalité publique et la personne qu’elle était dans l’intimité.

L'ASSASSINAT DE NORMA JEANE PAR L'ICÔNE MARILYN

Adapté du livre de Joyce Carol Oates, réputé pour son portrait peu embarrassé par la stricte réalité historique, Blonde d’Andrew Dominik, enfin concrétisé après une dizaine d'années de gestation, s’avère fidèle même si le cinéaste s'en émancipe également par le biais de deux parti-pris, l'un formel, l'autre thématique. Esthétiquement, l'exercice assume complètement sa dimension de mythe, en partant de photos célèbres de l'actrice pour les reconstituer scrupuleusement d'un point de vue visuel tout en imaginant ce qui s'y est dit et déroulé. Ainsi le film embrasse l'iconographie populaire de Marilyn Monroe, premièrement parce que c'est tout ce que le public connaît réellement d'elle, c'est comme ça qu'il l'a vue, qu'il la voit, mais ensuite pour en faire justement le carcan qui écrase la protagoniste. Le metteur en scène use tour à tour du format (on passe du 4:3 au 2.35 au 1.85 au...format smartphone?), d'un travelling avant qui s'arrête et reprend, resserrant sans cesse le plan pour échapper un interlocuteur, d'un flou ou d'une absence d'ambiance sonore, ne laissant que la voix en constant quasi-chuchotement de Marilyn, pour isoler, enfermer son personnage dans le cadre, dans son image inextricable.

Et Ana de Armas, tout simplement époustouflante, de chercher à s'en échapper, par l'humanité qu'elle confère au rôle. Quel chemin parcouru par l'actrice découverte dans Knock Knock. Blade Runner 2049 avait montré qu'elle pouvait camper une figure bien plus troublante mais là, elle est incroyable. Ce n'est pas juste le mimétisme, avec ce timbre de voix et cet accent cubain complètement disparu, qui pourrait fatiguer, ni même la ressemblance à deux doigts du deep fake par moments, c'est la vulnérabilité qu'apporte la comédienne, avec son visage poupon parfait (là où Naomi Watts et Jessica Chastain, successivement attachées au rôle, dégagent autre chose). Elle parvient à elle seule à éveiller l'empathie. C'est son humanité qui incarne la peinture impressionniste que Dominik fait de la vie d'une icône partagée entre sa création Marilyn et son désir de Norma(lité), cette quête désespérée d'un père chez les hommes et d'une mère en elle.

Narrativement, le récit peut donner l'impression d'un biopic classique, avec son enfance traumatisante, sa promotion canapé, ses amourettes tumultueuses, son défilé de personnalités et ses problèmes d'addiction mais ces étapes semblablement obligées dessinent en réalité l'arc distinct qui intéresse en particulier Dominik qui délaisse bien des événements à première vue importants de la vie de la star, même parmi ceux présents dans le matériau de base. D’aucuns reprochent au film l'angle d'attaque choisi, la focalisation sur les aspects les plus négatifs de la vie de Marilyn, polémiquant sur le regard de l'auteur, un misogyne fasciné par la Marilyn victime. Clairement, c'est ce qui intéresse l’auteur de Chopper et L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford, qui l'avoue clairement dans des interviews où il est à deux doigts de dire qu'il se fiche complètement de Marilyn Monroe, mais il n’y a aucune complaisance dans l'horreur qu'il dépeint. Blonde est peut-être mal-aimable mais il n’est pas là pour être aimé. Il est là pour donner une interprétation subjective d'un parcours précis. Qu'est-ce qui a mené ce sex-symbol à la mort? Et la réponse est un biopic cauchemardé d'une intensité et densité étouffante.

par Robert Hospyan

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