Les Bêtes du sud sauvage
Beasts Of The Southern Wild
États-Unis, 2012
De Benh Zeitlin
Scénario : Lucy Alibar, Benh Zeitlin
Avec : Quvenzhané Wallis
Photo : Ben Richardson
Musique : Dan Romer, Benh Zeitlin
Durée : 1h32
Sortie : 12/12/2012
Hushpuppy, 6 ans, vit dans le bayou avec son père. Brusquement, la nature s'emballe, la température monte, les glaciers fondent, libérant une armée d'aurochs. Avec la montée des eaux, l'irruption des aurochs et la santé de son père qui décline, Hushpuppy décide de partir à la recherche de sa mère disparue.
LA VIE RÊVÉE DE L'ANGE
Précédé d'une réputation flatteuse depuis le Festival de Sundance où il a été primé, Les Bêtes du sud sauvage est tout à fait à la hauteur de sa rumeur. Premier long métrage de Benh Zeitlin, le film raconte une Amérique invisible, celles de marginaux qui vivent dans leur micro-société bientôt détruite par les inondations, écho évident à l'ouragan Katrina qui s'est abattu sur le sud des Etats-Unis en 2005. Les Bêtes du sud sauvage, où s'imbriquent plusieurs mondes (ce monde à part dans lequel vit la petite héroïne, et son monde imaginaire), a beau être une toute petite production indépendante, elle évoque le meilleur du cinéma de M. Night Shyamalan. Dans Les Bêtes..., on a une foi inébranlable en l'imaginaire, en ses fruits et projections, on y croit fort comme on bande ses muscles. Légendes du bayou ou poésie hallucinée à la Toni Morrison se rencontrent, on parle de femmes chasseuses d'alligators, ou de terrifiants aurochs revenus de l'origine des temps suite à la fonte des glaces.
Refusant tout misérabilisme, Les Bêtes du sud sauvage se place clairement dans le registre de l'onirisme, un territoire à conquérir et apprivoiser, où les contes ne sont pas que des berceuses. La jeune Hushpuppy a mille histoires en tête pour affronter le réel. Des histoires en tête et dans la peau comme cette femme qui a des aurochs tatoués sur la cuisse. Les Bêtes du sud sauvage a en commun avec La Jeune fille de l'eau cette foi en l'imaginaire pour renverser le monde, cette conviction que l'imaginaire est une partie de soi, concrète comme un bras ou un pied, et qui peut bien débarquer dans la vie de tous les jours comme les créatures merveilleuses s'invitent dans le jardin à la fin du film de Shyamalan. En creux, un portrait d'enfance bouleversant, baigné dans l'éclat d'une rivière de guirlandes lumineuses. Les Bêtes du sud sauvage chante fort comme ces vidéos de Sigur Ros aux cieux remplis de feux d'artifice. On en sort le cœur gros, avec la certitude de découvrir là un énorme talent, très justement salué à Cannes par une longue standing-ovation.